Au lendemain de la mort de la légende du football, le Brésil entame, ce vendredi 30 décembre, un deuil national de trois jours.
Après la mort d’Elizabeth II en septembre, c’est une autre figure majeure du XXe siècle qui disparaît en 2022. La légende brésilienne du football, Pelé, est morte, jeudi 29 décembre, à l’âge de 82 ans. Aussi, au lendemain de sa mort, son pays entame un deuil national de trois jours, accompagné de condoléances planétaires.
La santé de Pelé, unique vainqueur de trois Coupes du monde et considéré par beaucoup comme le meilleur joueur de tous les temps, était chancelante depuis quelques mois : il luttait contre un cancer du côlon et avait été hospitalisé fin novembre à São Paulo. « Nous t’aimons à l’infini, repose en paix » : c’est par ces mots, publiés sur Instagram, que l’un de ses filles, Kely Nascimento, a annoncé le décès du Brésilien le plus connu de l’histoire, entouré de plusieurs membres de sa famille depuis quelques jours à l’hôpital Albert-Einstein de São Paulo.
Un deuil de sept jours à São Paulo
Quelques heures plus tard, un décret annonçait un « deuil officiel » de trois jours, « une marque de respect après le décès d’Edson Arantes do Nascimento, Pelé ». Une veillée funèbre, ouverte au public, aura lieu lundi et durera vingt-quatre heures, au stade du Santos FC, club où l’éternel numéro 10 a brillé de 1956 à 1974.
En revanche, l’enterrement, mardi, se déroulera dans l’intimité familiale, après un cortège suivant le cercueil dans les rues de Santos, ville portuaire à 80 km de São Paulo qui a décrété pour sa part un deuil de sept jours.
Devant l’hôpital pauliste où le triple champion du monde est décédé, des fans ont brandi une banderole où l’on pouvait lire « Roi Pelé éternel ». À Rio de Janeiro, le Christ Rédempteur du Corcovado, monument emblématique qui domine la baie, a été illuminé en hommage à Pelé, tout comme le mythique stade Maracana.
Des hommages du monde entier
« Deuil » pour le « roi immortel du football », titre le quotidien brésilien O Globo sur son site Internet, avec des images du joueur sous le maillot national, notamment celle, iconique, où, tout sourire, il lève le bras droit, porté par son coéquipier Jairzinho vu de dos avec son numéro 7.
Le monde du foot a fait part sur les réseaux sociaux de son émotion et a dessiné la dimension du personnage. « Il a fait du football un art », a écrit Neymar, son lointain successeur sous le numéro 10 de l’équipe brésilienne, et qui a égalé au Mondial qatarien son record national de 77 buts pour la Seleçao. Hommages également des superstars Lionel Messi et Kylian Mbappé : « Repose en paix, Pelé », a souhaité l’Argentin, tandis que le Français relevait que « son héritage ne sera jamais oublié ».
Les Français Michel Platini et Zinédine Zidane, le Portugais Cristiano Ronaldo, évidemment d’innombrables Brésiliens, comme l’ex-attaquant Ronaldo, tous ont partagé quelques mots et des photos en compagnie de l’icône, « le plus grand », selon ses anciens coéquipiers Mario Zagallo (Brésil) et Franz Beckenbauer (Cosmos New York).
Le monde politique a fait chorus, ou équipe, jusqu’au plus haut sommet de l’État. Au Brésil, bien sûr : « Jamais, il n’y a eu un numéro 10 comme lui », a réagi le président élu Luiz Inacio Lula da Silva, qui sera investi dimanche. Le président sortant Jair Bolsonaro a pour sa part salué la mémoire de celui qui a « porté le nom du Brésil dans le monde entier ».
Ailleurs, l’Américain Joe Biden a salué « une histoire de ce qui est possible », le Français Emmanuel Macron tweeté un triptyque « Le Jeu. Le Roi. L’Éternité » et le Sénégalais Macky Sall a applaudi « sa virtuosité, son génie et son humanisme ».
Un athlète hors du commun
Pelé, élu athlète du siècle par le Comité international olympique en 1999, a été un sportif hors du commun. Il y a son record de buts – 1 281 en 1 363 matchs sous les maillots de Santos, son club au Brésil (1956-1974), de la Seleçao et du Cosmos de New York (1975-1977), record homologué par la Fédération internationale de football américain (Fifa).
Mais, au-delà des statistiques, Pelé a révolutionné le foot, joueur emblématique du jogo bonito (« beau jeu ») et du Brésil titré à la Coupe du monde 1970 – « Il était le plus grand, et elle était la plus belle », écrit Vincent Duluc dans l’éditorial du quotidien sportif français L’Équipe.
Né le 23 octobre 1940 dans une famille pauvre à Tres Coraç?es, petite ville du Minas Gerais (sud-est) entourée de plantations de café, le petit Edson doit vendre des cacahuètes dans la rue pour aider ses parents. La légende dit que, enfant, il voit son père pleurer lors du Maracanazo de 1950, cette défaite du Brésil face à l’Uruguay privant le pays du « futebol » de son premier titre mondial, et il lui promet qu’il le remportera.
Et il remplit sa promesse à 17 ans,en éclaboussant la Coupe du monde 1958 en Suède de ses buts et de sa classe. En larmes, il est porté en triomphe par ses coéquipiers. Il est à nouveau titré en 1962, même si son tournoi est abrégé par une blessure – une autre écourte aussi sa participation à l’édition 1966. Le Mondial 1970, le premier retransmis en couleur à la télévision, marque son apothéose.
Un monument national et mondial
C’est depuis un monument national et mondial, même si, contrairement à l’éternel rebelle Diego Maradona ou à l’idole du peuple Garrincha, il a souvent été perçu au Brésil comme un homme proche du pouvoir établi, y compris pendant la dictature militaire (1964-1985).
Sa notoriété le poussera aussi vers d’autres terrains – le cinéma, la chanson et même la politique, avec un poste de ministre des Sports (1995-1998), parallèlement à une trajectoire personnelle mouvementée – trois mariages, sept enfants (reconnus) et une vie de telenovela. Royale.
Avec Le Point