Afrique : Les partis politiques rejettent le «piège» des conclusions du dialogue inter-Maliens

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Les partis politiques rejettent le « traquenard » des conclusions du dialogue inter-Maliens. Le 10 mai 2024, les recommandations finales de cette initiative voulue par le président de transition, le colonel Assimi Goïta, ont été rendues publiques. Pas moins de 300 recommandations, parmi lesquelles, notamment, l’allongement de la période de transition de 2 à 5 années. Dans un communiqué diffusé le 12 mai, les partis politiques de la Déclaration du 31 mars, coalition qui rassemble la quasi totalité des formations maliennes, toutes tendances confondues, rejettent les conclusions de ce dialogue qualifié de « grotesque piège politique ». À leurs yeux, les Maliens « ont été dupés ».

« L’exercice qui vient de se terminer n’a accouché d’aucune initiative malienne de paix et de réconciliation », notent d’emblée les formations signataires.

C’était pourtant, officiellement, l’objectif de ce dialogue, présenté comme une alternative nationale au défunt accord de paix de 2015, signé sous l’égide d’une médiation internationale.

Mais il a été « vidé de son contenu, détourné de ses objectifs initiaux », et « les masques sont tombés ». Les mouvements d’opposition les plus radicaux, comme Jiguiya Koura ou l’Appel du 20 février, mais aussi les partis traditionnellement plus mesurés comme Yelema, l’Adema ou le PS Yelen Koura. Tous estiment que ce sont les autorités de transition elles-mêmes qui ont « inspiré une proposition de nouvelle prolongation de deux à cinq ans, donnant ainsi raison à ceux qui ont parlé d’une transition à durée indéterminée », et « ignorant superbement les aspirations profondes des Maliens » : eau, électricité, libertés publiques…

 « Les Maliens en otage »

Et de s’interroger : en quoi ce type de recommandations, sur la prolongation de la transition ou la future candidature d’Assimi Goïta, « concourent-elles au rétablissement de la paix ? Pourquoi annoncer l’ouverture d’un dialogue avec les groupes armés à la fin du dialogue inter-Maliens » et non durant ce dialogue ?

Pour les partis politiques maliens, dont les activités ont été suspendues le mois dernier, l’objectif des colonels qui dirigent le pays depuis bientôt quatre ans est clair : « Ils veulent s’éterniser au pouvoir en prenant en otage le Mali et les Maliens. »

La coalition rappelle enfin que ceux qui ont participé au dialogue, même « de bonne foi », ne représentent qu’eux-mêmes. Ils ne sont « pas élus » et leurs recommandations « ne sauraient avoir valeur exécutoire ».

Les partis politiques exhortent donc « le peuple malien » à se mobiliser pour « le retour à l’ordre constitutionnel selon un calendrier fixé de façon consensuelle, avec une nouvelle architecture institutionnelle », le seul combat qui permettra au Mali, selon eux, d’amorcer une sortie de crise. –

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Ismaël Sacko, président du parti PSDA: «La junte veut se maintenir au pouvoir pour un régime militaire dictatorial»

« Il n’a pas été question de paix, de réconciliation ou d’unité nationale. Il s’agissait plutôt de travailler sur les avantages de la junte au pouvoir. On ne peut pas parler d’un dialogue inter-Maliens en l’absence des groupes armés du Nord. On ne peut pas parler d’un dialogue inter-Maliens alors que la classe politique s’est retrouvée mise à l’écart [après la suspension des activités des partis le mois dernier, NDLR]. Nous avons constaté avec regret qu’il a été plutôt question d’une prolongation de la transition de deux à cinq ans. C’est comme si on était toujours dans un éternel recommencement ! Il s’agit de maintenir la junte au pouvoir et d’aller vers un régime militaire dictatorial ».

Pour ce farouche opposant aux autorités de transition actuelle, la recommandation prônant de prolonger la transition est « téléguidée » : « Elle était prévue d’avance, le jeu était biaisé, alors que la transition malienne est arrivée à terme le 26 mars 2024 [date qui avait été fixée pour la fin de la transition, il y a deux ans, par un décret présidentiel du Colonel Assimi Goïta, NDLR]. Aujourd’hui, pour nous, la transition malienne est hors-la-loi. Nous sommes dans un vide juridique. Nous ne nous reconnaissons pas dans ces recommandations, et c’est pourquoi il est important que l’ensemble des Maliens se donnent la main pour réfléchir à une nouvelle architecture politique pour aller vers une transition civile. »