L’offensive contre Kharkiv se poursuit depuis trois semaines et face à l’ampleur de l’assaut du Kremlin, l’Ukraine avait demandé à plusieurs reprises l’autorisation d’utiliser des armes occidentales pour frapper à distance le territoire russe. Les États-Unis ont donné leur feu vert jeudi soir.
Jeudi soir 30 mai, le président américain Joe Biden, qui s’y refusait jusqu’ici, a autorisé Kiev à frapper des cibles sur le sol russe pour défendre cette ville. Le responsable américain qui a transmis l’information a toutefois ajouté que les États-Unis continuaient à s’opposer à des frappes ukrainiennes en profondeur sur le territoire russe.
Avec cet accord donné par Washington, dans les semaines qui viennent, les Ukrainiens pourront utiliser dans la région de Kharkiv des armes à longue portée comme les missiles sol-sol ATACMS américains, éventuellement les missiles Scalp français, ou encore le Storm Shadow britannique, pour frapper les positions russes qui sont de l’autre côté de la frontière russe. Notamment des aérodromes desquels partent les avions qui larguent des bombes planantes sur les villes ukrainiennes, comme sur Kharkiv, rapporte notre correspondant à Kiev, Stéphane Siohan.
Kharkiv est frappée en permanence et ne peut se défendre de ces frappes russes. Ce vendredi, trois personnes ont été tuées et 23 blessées dans des frappes russes sur la ville du nord-est de l’Ukraine, ont annoncé les autorités régionales.
Des missiles S-300 et S-400 ont été lancés depuis le territoire de la région de Belgorod, en Russie, frontalière de l’Ukraine, selon le bureau du procureur régional, qui fait état de cinq frappes. D’autres personnes pourraient toujours se trouver sous les décombres, a précisé le maire de la deuxième ville d’Ukraine, Igor Terekhov. La Russie a ciblé un immeuble d’habitation.
« Les conditions ont changé »
L’enjeu d’autoriser l’utilisation d’armes sur des cibles militaires russes est extrêmement fort, et était discuté dans les médias ukrainiens ces derniers jours. Plusieurs pays avaient sauté le pas, comme la Norvège et le Danemark. D’autres, dont la Pologne ou les Pays-Bas, fournissent des armes à l’Ukraine sans aucune restriction sur leur usage.
La France a annoncé cette semaine y être également favorable, jugeant que l’Ukraine avait le droit de se défendre, y compris en frappant des cibles militaires légitimes en territoire russe.
Mais ce n’était pas encore le cas des États-Unis, alors que l’Ukraine peut utiliser les missiles ATACMS sur le territoire ukrainien. Désormais, c’est peut-être chose faite. La position d’Antony Blinken, chef de la diplomatie américaine, semble s’être élargie à d’autres secteurs de la Maison Blanche et du Pentagone.
« Alors que les conditions ont changé, alors que le champ de bataille a changé, alors que la Russie a modifié la manière de conduire son agression, nous nous sommes adaptés et ajustés et je suis convaincu que nous continuerons de le faire », avait-il dit à la presse lors d’une visite en Moldavie. En réaction, l’Ukraine a estimé que ce feu vert américain « renforcera significativement » sa défense face aux assauts russes.
Ce vendredi matin, l’Allemagne, pourtant jusqu’à-là récitcente à cette idée, a finalement, à son tour, autorisé l’utilisation des armes allemandes contre des cibles militaires en Russie, après une annonce du porte-parole du chancelier Olaf Scholz. « L’Ukraine a le droit, garanti par la législation internationale, de se défendre contre ces attaques. Pour ce faire, elle peut également utiliser les armes fournies à cet effet, y compris celles que nous avons livrées », a déclaré Steffen Hebestreit dans un communiqué.
Sommet Ukraine-Europe du nord pour parler armement
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a en outre annoncé ce vendredi qu’il était en Suède pour demander plus d’armement à ses cinq alliés des pays nordiques pour faire face à l’offensive russe.
« Nos principales priorités consistent à garantir davantage de systèmes de défense antiaérienne pour l’Ukraine, des projets conjoints dans le domaine de l’industrie de la défense et des armes pour nos guerriers, ainsi que des efforts au niveau mondial pour forcer la Russie à faire la paix », a dit le président sur les réseaux sociaux.
Volodymyr Zelensky va rencontrer les chefs d’État ou de gouvernement de Suède, Danemark, Norvège, Finlande, et Islande et signer trois accords de sécurité, à l’occasion du troisième sommet Ukraine-Europe du nord, a-t-il précisé. Le Premier ministre suédois Ulf Kristersson a indiqué que les pays réunis ce vendredi « allaient prendre des mesures importantes pour renforcer la coopération entre nos pays dans le cadre de notre soutien à l’Ukraine ».