Un référendum historique était organisé ce dimanche 25 octobre et les électeurs ont très largement dit « oui », avec près de 78% des voix. Ils devraient ainsi abandonner la Constitution actuelle, héritée de la dictature de Pinochet. Un texte modifié plusieurs fois depuis le retour à la démocratie en 1990, mais qui protégeait le modèle économique néo-libéral imposé sous l’ex-dictateur. Hier soir les Chiliens sont sortis célébrer le résultat de plus d’un an de mobilisation sociale.
Selon des résultats quasi définitifs portant sur plus de 99% des bureaux de vote, les suffrages favorables à une nouvelle Constitution l’emportaient largement avec 78,28% des voix, contre 21,72% pour le vote rejetant cette option. La participation s’élève à environ 50%, selon l’autorité électorale. L’option d’une « Convention constituante » uniquement formée de citoyens l’emporte par 79% des voix, contre 21% pour une « Convention mixte » composée de citoyens et de parlementaires. Le projet de Constitution sera soumis à référendum en 2022.
Sous les feux d’artifice, plus de 10 000 personnes se sont réunies dans la soirée Place de la dignité, comme l’ont rebaptisée les manifestants depuis le mouvement social d’octobre 2019 contre les inégalités. Il y a un an jour pour jour, la contestation contre les inégalités avait connu un tournant lorsque 1,2 million de personnes s’étaient rassemblées sur cette emblématique Plaza Italia, rebaptisée Place de la dignité. Déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro à Santiago, la contestation a été nourrie par la colère de la population dénonçant la déconnexion des élites face au quotidien difficile du plus grand nombre et a pris de court l’ensemble de la classe politique.
Maria Fernanda, 33 ans, vient d’un quartier populaire de Santiago. « Je suis vraiment heureuse que le « oui » ait gagné. Peut-être que je ne verrai pas de changement aujourd’hui ni demain mais je pense que mes enfants et mes petits-enfants eux en verront, et c’est ce qui compte pour moi », confie-t-elle.
« Un exemple de démocratie »
Malgré la pandémie, les manifestants sont venus en famille ou entre amis. Guillermo, 47 ans, tient à remercier les jeunes, qui ont lancé le mouvement social l’an dernier : « Les gens de ma génération sont les enfants de la dictature. Mais la génération suivante, celle de nos enfants est arrivée. Et elle a réussi à obtenir que les choses changent. Aujourd’hui c’est la fin de la dictature de Pinochet, c’est un moment historique. Et ce vote est un exemple de démocratie. »
Les mesures les plus antidémocratiques de la Constitution actuelle ont été retirées petit à petit après la fin de la dictature. Mais le modèle néo-libéral imposé sous Pinochet est aujourd’hui encore protégé par la Constitution. Et ce dimanche les Chiliens ont massivement démontré qu’ils souhaitaient mettre fin aux inégalités produites par ce modèle.
Le président conservateur Sebastian Piñera a réagi très peu de temps après les résultats. Dans une allocution télévisée, il a appelé à l’« unité » du pays pour rédiger la « nouvelle Constitution ». « Jusqu’à présent, la Constitution nous a divisés. À partir d’aujourd’hui, nous devons tous collaborer pour que la nouvelle Constitution soit un espace d’unité, de stabilité et d’avenir », a insisté le chef de l’État.
En raison de la pandémie de coronavirus qui a durement frappé le Chili (500 000 contaminations, 14 000 décès), les électeurs, dûment masqués, ont formé toute la journée de longues files d’attente devant les centres de vote.
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RFI