Au Mali, les autorités de transition apportent des précisions sur l’interdiction des ONG soutenues par la France financièrement, matériellement ou techniquement. Cette annonce « avec effet immédiat » faite de façon fracassante le 21 novembre dernier suscite depuis de nombreuses interrogations et certaines craintes dans le secteur associatif et plus globalement parmi les milliers de bénéficiaires du travail de ces ONG dans tous les secteurs – sanitaire, alimentaire, éducatif, agricole… – et dans tout le pays.
Un communiqué publié à l’issue du conseil des ministres de mercredi et des instructions diffusées jeudi soir par le ministère de l’Administration territoriale pour le suivi et le contrôle de cette mesure d’interdiction apportent de nouveaux éléments. 294 associations, organisations non gouvernementales, fondations et assimilées sont concernées par cette mesure.
Un chiffre pléthorique et inédit, issu du travail de recensement mené ces dernières semaines par les autorités maliennes de transition, qui avaient demandé à toutes les organisations opérant sur le sol malien de préciser leurs sources de financement. Les autorités territoriales maliennes et les ambassades étrangères avaient également été sollicitées. Le détail de ce chiffre n’est pas indiqué, mais son ampleur permet de comprendre que beaucoup d’associations nationales, maliennes, sont concernées.
Remplacer l’argent français
Cela ne signifie pas que les 294 organisations recensées sont interdites : des ONG maliennes, françaises et d’autres nationalités avaient déjà obtenu l’assurance que seuls les programmes soutenus par l’État français étaient interdits. Les financements des ONG étant le plus souvent multiples, certains programmes d’une même organisation peuvent être soutenus par un bailleur et d’autres programmes par d’autres bailleurs. Certaines organisations, qui avaient stoppé leurs activités immédiatement après l’annonce du 21 novembre dernier, les avaient ainsi déjà reprises, au moins partiellement. Mais les ONG devront tout de même trouver des financements de substitution, pour remplacer l’argent de la France, si elles veulent reprendre les activités qu’elles ont dû suspendre, au détriment de milliers de bénéficiaires.
Contrôle des ONG renforcé
Les dispositifs de contrôle du secteur associatif sont largement renforcés. Ces dispositifs ne concernent pas seulement les 294 ONG soutenues par la France et recensées par les autorités de Bamako, mais l’ensemble des organisations travaillant au Mali. Les sources de financement de toutes les ONG maliennes et étrangères devront être validées par le ministère de l’Administration territoriale : annuellement pour les organisations maliennes, mensuellement pour les organisations étrangères.
Les organisations étrangères se voient quant à elles imposer de nouvelles exigences spécifiques : toutes les correspondances adressées à des organismes d’État devront être partagées avec le ministère de l’Administration territoriale. Plus contraignant : chaque mois, les organisations étrangères devront présenter la situation de leurs comptes en banque avec l’origine des fonds, et fournir un rapport d’activités. Pour chaque activité menée, des justificatifs d’achats devront être fournis aux représentants locaux de l’État.
Autres dispositions plus larges à venir
La bonne application de ces directives sera surveillée par une toute nouvelle « Commission nationale de coordination, d’évaluation, de suivi et de contrôle des associations et ONG », et par ses ramifications dans les régions et les localités maliennes, rattachées au ministère de l’Administration territoriale, qui devient donc la tour de contrôle du financement et des activités des ONG.
D’autres dispositions à venir sont annoncées « pour adapter l’ensemble des dispositifs d’intervention des partenaires extérieurs à l’orientation politique et à la souveraineté du Mali. » Un champ plus large donc que celui du secteur associatif. Aucune précision n’a été communiquée à ce stade.