Cela fait neuf jours que le Niger subit les sanctions des pays de la Cédéao, dont un blocus économique qui empêche tout commerce avec les pays du bloc ouest-africain et qui touche aussi les exportations de pétrole, autre manne financière de Niamey. Un projet d’oléoduc reliant les régions pétrolifères de l’est avec le port de Cotonou, au sud du Bénin, est notamment menacé.
Après de nombreuses décennies à chercher du pétrole dans le sous-sol, le Niger a commencé à exploiter son or noir en 2011. C’est la compagnie nationale chinoise, la CNPC, qui a découvert des ressources de pétrole dans la région d’Agadem, à l’est du pays. Depuis, la production est essentiellement destinée au marché national, permettant au Niger d’être auto-suffisant en pétrole, avec environ 20 000 barils par jour. Les exportations, assez faibles en volume, sont limitées à des pays de la région. Le Niger compte également une seule raffinerie, à Zinder, au sud du pays.
Mais un projet d’oléoduc doit tout changer. Depuis plusieurs années, un pipeline, reliant les régions pétrolifères de l’est avec le port de Cotonou, au sud du Bénin, est en construction. Cette infrastructure de 2 000 kilomètres de long, financée par la compagnie nationale chinoise, doit permettre au Niger de développer le secteur des hydrocarbures. « Il était prévu, une fois la mise en place de l’oléoduc, que ces ressources soient beaucoup plus importantes. En passant de 20 000 à 110 000 barils par jour, le Niger aurait engrangé à peu près 500 millions de dollars de recettes par an », explique Amaury de Félingonde, directeur associé d’Okan, un cabinet de conseil en stratégie et en finance dédié à l’Afrique. Une somme qui représente le quart du PIB du pays, la moitié des recettes fiscales, et environ 70 % des exportations. Un enjeu très important pour le Niger, mais aussi pour son voisin le Bénin, puisque, sur 20 ans, le pays doit recevoir 500 millions de dollars au titre des droits de passage.
L’avenir du projet d’oléoduc en question
Cet oléoduc doit aussi créer de l’emploi au Niger. « Le pétrole représente un véritable enjeu en termes d’emploi formel qualifié, explique Amaury de Féligonde. On estime qu’avec la pleine marche de ce secteur, entre 8 et 10% des emplois formels du Niger seraient liés directement ou indirectement au secteur des hydrocarbures ». Avant le coup d’État le 26 juillet dernier, l’oléoduc était terminé à 97 %. Les premiers essais devaient avoir lieu en octobre prochain, avant des premières exportations « d’ici la fin de l’année » selon Amaury de Féligonde.
Mais les sanctions des pays de la Cédéao, imposées à la suite du coup d’État, mettent en question l’avenir du projet. Le bloc ouest-africain a fermé les frontières avec le Niger et interdit tous les échanges commerciaux avec Niamey. Or, le Bénin, partenaire clé dans ce dossier, fait partie des pays de la Cédéao. « Tous ces événements étant assez frais, je pense que la poussière n’a pas eu tout à fait le temps de retomber, souligne Amaury de Féligonde. Mais il est sûr qu’aujourd’hui, avec le blocus, la finalisation du projet va être probablement compliquée. Pour faire des essais, il faut faire venir des techniciens, ce qui va être probablement compliqué dans les mois à venir ». Les prochaines semaines sont donc cruciales pour l’avenir du secteur des hydrocarbures au Niger.