(Aucun parti politique n’a jamais conduit à terme une bonne politique dans l’histoire du Bénin)
Depuis 1960 à nos jours, aucun parti politique n’a pu conquérir le pouvoir politique et l’exercer à terme dans l’histoire politique du Dahomey devenu République du Bénin. La réforme du système partisan au Bénin sous le président Patrice Talon est une bonne initiative du fait qu’elle encourage les grands rassemblements et permet d’éclaircir le paysage politique actuellement animé par une dizaine de partis politiques. Mais les acteurs de la dite réforme semblent oublier les torts causés par les partis politiques dans la gouvernance au sommet de l’ État , ce qui fait craindre que les élections générales de 2026 risquent de nous ramener à la case départ des crises politiques qui ont émaillé la gestion du pouvoir d’État de 1960 à 1972.
Les partis politiques clanique et régionaliste des leaders politiques d’après indépendance notamment Hubert Coutoucou Maga, Justin Tométy Ahomadégbé et Sourou Migan Apithy ont montré leur incapacité à fédérer les dahoméens autour d’un idéal politique dans l’exercice du pouvoir. Cette situation a conduit plusieurs fois à des coups d’État au point où le Dahomey d’alors était traité d’enfant malade d’Afrique. Cet imbroglio politique a conduit à la mise en place d’un monstre à 3 têtes, finalement neutralisé par le commandant devenu Général Mathieu Kérékou le 26 octobre 1972. Ce dernier a exercé le pouvoir sans partage jusqu’à l’avènement de la conférence nationale de février 1990.
La première élection présidentielle de mars 1991 a été remportée par le premier ministre de la transition Nicéphore Dieudonné Soglo qui était une personnalité neutre, ancien fonctionnaire de la banque mondiale. Au cours de l’exercice du pouvoir d’État, il a créé le parti Renaissance du Bénin (RB) dirigé de mains de maître par son épouse feue Rosine Vieyra Soglo. Les dérives du parti Renaissance du Bénin ont cristallisé des griefs contre la gouvernance du président Nicéphore Dieudonné qui a perdu les élections présidentielles de mars 1996 remportées par le Général Mathieu Kérékou soutenu par une coalition de partis politiques. Avant de continuer, je voudrais rendre un vibrant hommage au professeur Maurice Ahanhanzo Glèlè, grand constitutionnaliste qui a su tirer leçons de l’histoire politique du Dahomey et a opté pour le multipartisme intégral dans la constitution du 11 décembre 1990.
Au retour du Général Mathieu Kérékou au pouvoir en 1996 , celui-ci a tiré leçons de l’échec de son prédécesseur Nicéphore Dieudonné Soglo. Le Général Kérékou n’a jamais créé de parti politique et s’est vu renouveler son mandat en mars 2001. En 2006, c’est un homme providentiel, président de la banque ouest africaine de développement Boad, Thomas Boni Yayi, sans parti politique qui a remporté les élections face au candidat porté par les partis politiques. Le docteur en économie Boni Yayi a fait un K. O. aux élections de mars 2011 avec son parti politique Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE) mais ce parti n’a pas permis à son dauphin désigné Lionel Zinsou de remporter les élections présidentielles de mars 2016 face au candidat Patrice Athanase Guillaume Talon porté par une coalition de partis politiques. Pour renouveler son mandat après cinq ans d’exercice, le président Talon a modifié la constitution de 1990 en 2019 pour instaurer dans le code électoral les questions de parrainage. Ce qui lui a permis d’écarter ses opposants politiques et de remporter l’élection présidentielle de 2021 face à des candidats qui ne font pas le poids sur la scène politique au Bénin. C’est alors qu’il a conduit les réformes du système partisan qui ont donné naissance à deux partis siamois de la mouvance présidentielle Union progressiste le Renouveau UpR et le Bloc républicain Br ainsi que d’autres partis dits de l’opposition notamment Les démocrates (LD), la Force Cauris pour un Bénin émergent (FCBE), le Mouvement populaire de la Libération MPL, et j’en oublie. Pour les élections générales de 2026, un code électoral est voté par les partis de la majorité présidentielle et dénoncé par les autres partis de l’opposition. Ceux-ci jugent ce code électoral de crisogène et exclusif et demande une relecture qui n’est pas accepté par le président Talon qui l’a promulgué. A quelques mois des élections générales, chaque parti politique travaille à conquérir le pouvoir sans désigner nommément son candidat. L’émergence d’un homme providentiel pour les élections présidentielles de 2026 est à écarter avec la tombée en disgrâce de l’homme d’affaires, ami proche du président Talon accusé de tentative d’atteinte à la sûreté de l’État, Coffi Ange Olivier Boko. Celui-ci jusqu’à la veille du 24 septembre 2024, date de son arrestation pour tentative de coup d’État était cité dans la presse comme un candidat potentiel pour les présidentielles de 2026. Le code électoral impose d’appartenir désormais à un parti politique pour prétendre exercer le pouvoir politique au sommet de l’État. Cette situation va t-elle améliorer la gouvernance politique en 2026 ? Bien malin qui pourra répondre à cette question. Les jours à venir nous édifieront.
Adrien Hounvènou