Le 27 juin 2024, Joe Biden sort fragilisé à l’extrême après un débat raté face à Donald Trump. Le 21 juillet, il se retire de la course à la présidentielle qui doit se tenir le 5 novembre prochain. Récit des vingt-cinq jours qui ont mené à la chute du président Biden
Le 27 juin 2024, sur scène, le dirigeant démocrate est souvent apparu confus, mâchant ses mots et s’emmêlant plus d’une fois les pinceaux. Donald Trump, condamné au pénal fin mai 2024, a lui largement imposé son style, multipliant les exagérations et les contre-vérités, notamment sur l’immigration, sans intervention des deux journalistes de CNN animant la soirée. Selon un sondage de CNN conduit auprès de téléspectateurs, le verdict est pourtant sans appel : deux tiers d’entre eux ont jugé que Donald Trump avait remporté le match. Les réactions affligées et les appels à se retirer venant de démocrates anonymes se sont répandus dans la presse à peine le débat terminé. Ce débat sonne le début de la panique pour les démocrates.
Dès le lendemain, le vendredi 28 juin 2024, la presse pose la question du maintien de sa candidature à un second mandat. Nous sommes alors à quatre mois de l’élection présidentielle et à six semaines de la convention démocrate censée investir le président américain.
Le comité de rédaction du prestigieux journal américain New York Times appelle ainsi le président Joe Biden à se retirer de la course à la Maison Blanche. « Joe Biden, un homme bien, un bon président, n’est pas en position de briguer une réélection », écrit l’éditorialiste Thomas Friedman. Celui qui se décrit lui-même comme un « ami » du président américain dit avoir « pleuré » en voyant le démocrate de 81 ans, par moments hagard, buter sur les mots et bafouiller pendant 90 minutes devant les caméras de CNN. Officiellement, dans les rangs démocrates, la ligne reste de soutenir le candidat octogénaire. Le scénario d’un retrait semble alors très peu probable.
« Je ne parle pas aussi facilement qu’autrefois, je ne parle pas aussi aisément qu’autrefois, je ne débats pas aussi bien qu’autrefois », a reconnu Joe Biden, en meeting à Raleigh, en Caroline du Nord le 28 juin 2024. « Je vous donne ma parole de Biden. Je ne me représenterais pas si je ne croyais pas, de tout mon cœur et de toute mon âme, que je peux faire ce boulot », a toutefois ajouté le président américain, en disant son « intention de gagner » cet État disputé du sud-est.
« Il nous faut un nouveau candidat »
L’acteur George Clooney avait aussi appelé le président américain à se retirer de la course à la Maison Blanche dans une tribune publiée le 10 juillet dans le New York Times « J’aime Joe Biden. Mais il nous faut un nouveau candidat », écrivait-il.
Le même jour, l’un des premiers poids lourds à avoir exprimé des réserves quant au maintien de la candidature de Joe Biden est Nancy Pelosi. Sur MSNBC, l’ancienne présidente de la Chambre des représentants, restée très influente, a mis le démocrate au pied du mur, de manière subtile, mais implacable. « C’est au président de décider s’il va se présenter » en novembre face à son prédécesseur républicain Donald Trump, a-t-elle déclaré sur cette chaîne prisée des démocrates. « Nous l’encourageons tous à prendre cette décision, car le temps presse », a-t-elle ajouté.
Le lendemain, Joe Biden, qui joue désormais sa survie politique à chaque apparition publique, fait face à un test redoutable pour sa candidature à la présidentielle : une grande conférence de presse à l’occasion de la fin du sommet de l’Otan. Il s’agit d’un moment capital pour la candidature du président qui doit rassurer son camp et mettre fin aux doutes qui se répandent. Mais alors que le président des Etats -Unis se doit d’être rassurant, il a commencé par inquiéter en confondant, avant de se reprendre, les noms de deux dirigeants actuellement en guerre l’un contre l’autre. Il appelle l’Ukrainien Volodymyr Zelensky du nom de son ennemi mortel, le Russe Vladimir Poutine.
Barack Obama, le coup de grâce ?
Peu de temps après, l’ex-président américain Barack Obama aurait fait part de ses doutes sur la « viabilité » de la candidature de Joe Biden. Le chef de l’État se voit contraint jeudi 17 juillet de mettre sa campagne sur pause car il a contracté le Covid-19. Le même jour, le Washington Post a rapporté que Barack Obama, dont Joe Biden a été le vice-président, avait affirmé à des proches penser que son ancien acolyte devait « sérieusement évaluer la viabilité de sa candidature ». Ces propos rapportés auront-ils été le coup de grâce pour Joe Biden ?
C’est finalement le dimanche 21 juillet 2024 qui restera dans l’histoire. Selon une source citée par l’agence Reuters, Joe Biden a brusquement changé d’avis sur le maintien de sa candidature au cours du week-end. « Hier soir [samedi] le message était de continuer, d’aller de l’avant à fond », a déclaré cette source à Reuters. « Aux alentours de 13h45 aujourd’hui (17h45 TU), le président a dit aux cadres de sa campagne qu’il avait changé d’avis. »
À 13h46 (19h46 heure de Paris), le couperet tombe : Joe Biden publie un communiqué de presse sur le réseau social X annonçant son retrait de la course à la Maison Blanche. « Ce fut le grand honneur de ma vie d’être votre président. Et même si j’ai eu l’intention de me faire réélire, je crois qu’il est dans l’intérêt de mon parti et du pays que je démissionne et que je me concentre uniquement sur mes fonctions de président », écrit-il, plongeant ainsi son pays dans une ère d’incertitudes.