Au colloque international sur Réformes et sociétés à l’UAC, le Professeur Joseph Djogbénou a présenté une doléance. « Il est temps que l’Université s’ouvre à ceux qui sont chargés de conduire la nation », -t-il dit.
C’est une première à l’université d’Abomey-Calavi. Quatre centres de recherches et laboratoires à savoir : Le Centre de recherches et d’études en Droit et Institutions judiciaire en Afrique (CREDIJ) du Professeur Joseph DJOGBENOU, le Centre de droit administratif et de l’administration territoriale (CEDAT) du Professeur Ibrahim SALAMI, le Centre d’études sociologiques et de science politique (CESPo) du Professeur Hygin KAKAI et le Laboratoire d’analyse et recherche, religion, espaces et développement (LARRED) du Professeur Dodji AMOUZOUVI ont décidé de se mettre ensemble pour réfléchir sur un thème : Réformes et sociétés : Une perspective croisée des sciences administratives, juridiques, politiques et sociologiques. Cette rencontre a eu lieu hier mercredi 18 Novembre 2020 à l’amphi Idriss Déby à l’occasion d’un colloque international de la rentrée qui a également vu la présence du Président Bruno AMOUSSOU.
Dans son mot introductif, le Professeur Joseph DJOGBENOU a situé les participants sur les impacts et les implications politiques juridiques, administratives et sociologiques des réformes engagées depuis 2016 sur la société. Nous vous proposons de lire l’intégralité de son intervention riche en enseignement.
MOT DU PROFESSEUR JOSEPH DJOGBENOU
« Je voudrais pour répondre à cette invitation poser une double préoccupation :
La Première, Pourquoi quatre Laboratoires se mettent-ils ensemble pour lancer leur année de recherches?
Il faut bien considérer que sans doute, les universitaires et les chercheurs réalisent avec un sens plus élevé la nécessité d’une orientation stratégique de la recherche scientifique dans le contexte d’un Etat en quête de développement. En raison de ce que simplement, la recherche n’est scientifique que si elle est cheminement vers les solutions aux problèmes fondamentaux auxquels la société est exposée. Elle doit éprouver son utilité à l’aune des besoins de la communauté. Ce n’est pas la communauté qui s’élève à la recherche, c’est la recherche qui se projette vers la communauté. Elle ne doit pas viser à satisfaire les fantasmes du chercheur mais pister des solutions aux aspirations de la cité (la cité étant prise ici au sens politique). Il m’a semblé que c’est prenant en compte cette nécessité de l’orientation stratégique de la recherche tournée vers les réalités sociétales que ces centres de recherche ont décidé d’engager des réflexions d’ensemble vers des réponses possibles aux préoccupations de notre société. Mais ensuite il faut en tirer la conséquence.
La conséquence est la nécessité encore plus élevée de l’interdisciplinarité. Comme l’être qui se pense, se prétend et se construit comme humain, la société se présente aux chercheurs moins comme une unité, mais plutôt comme une totalité. De ce point de vue, l’approche holistique se présente alors comme la démarche épistémologique adaptée à son étude. Nous ne pourrons pas regarder notre société selon des prismes individuels et individualistes, certaines fois égoïstes. La société tournée vers l’Homme et l’Homme tourné vers la société est une totalité et de ce point de vue, nous devons l’envisager en tant que tel. Parce que tout conduit à l’être humain vivant en société. L’interdisciplinarité apparaît de plus en plus comme un impératif tout aussi épistémologique en raison de la complexité du sujet de recherche. Mais l’interdisciplinarité recherchée dépasse l’intradisciplinarité tournée vers le chercheur, vers son domaine qui est une sorte de discussion avec soi-même. L’interdisciplinarité excède également la transdisciplinarité qui projette plutôt le chercheur sur des disciplines qui lui sont a priori étrangères.
L’interdisciplinarité que nous célébrons à l’occasion de cette rentrée apparaît plutôt comme un lien entre chercheurs de disciplines différentes sur un sujet identique. C’est un dialogue sur le sujet, sur l’objet, sur la méthode et sur les résultats. Ce dia logos, c’est-à-dire cette confrontation de diagnostic de perspectives et la condition de la complétude sociale et politique de la recherche scientifique. Et c’est pour cette raison que le sociologue, juristes de différentes obédiences politiste proposent à l’occasion de cette rentrée de se projeter ensemble sur un sujet essentiel qui vient d’être indiqué : la réforme dans notre société.
La deuxième question ! Pourquoi un tel sujet ?
Pourquoi se poser des questions sur société et réforme ? Une perspective croisée de vécu et perception à partir des sciences administrative juridique politique et sociale.
L’idée de réforme fait partie des déterminants sociaux et constitue un impératif consubstantiel à la société quels que soient les noms : changement, refondation, nouveau départ, modification, évolution, révolution, révision, amendement, rénovation. Comme l’être humain, une société qui n’évolue pas, qui ne change pas, alors qu’elle est soumise aux lois du temps est une société qui ne vit plus. La réforme est donc de l’ordre de la vie. Mais la question depuis 2016, qu’une expérience nouvelle de réforme politique, nécessairement sociale, surtout législative est en cours, quel rapport, quelle perspective, quelle efficacité et même quelle efficience sociale.
Pour quoi réformer ? Comment réformer ? Avec qui réformer ? Sur quoi réformer ?
Il était important en observant cette distanciation scientifique, les chercheurs se saisissent de cette préoccupation et avec des exemples bien précis qu’ils proposent des pistes de solutions pour renforcer, pour accompagner pour inciter et donc pour aider les opérationnels de la réforme dans cette œuvre formidable d’accompagner les mutations sociales dans notre pays.
Il est temps que les acteurs publics, les acteurs politiques investissent nos universités. Il est temps que l’université s’ouvre à celles et ceux qui sont chargés de conduire la nation pour recevoir leurs expériences. L’on ne peut avec utilité, avec intelligence, avec force, avec méthodologie appliquée, contribuer en tant que chercheurs au développement d’un pays en se détachant des acteurs qui sont dans l’opérationnel. C’est pour cela que nous voudrions remercier le président Bruno AMOUSSOU d’avoir accepté d’introduire ce sujet. Et c’est avec beaucoup d’intérêts que nous allons tous l’écouter et sans doute avec beaucoup de raison que de son intervention, nous allons tirer les raisons principales pour nous-mêmes pour nos étudiants et pour nos recherches ».