À peine ouvert le 11 octobre, le procès des auteurs présumés de Thomas Sankara, ancien président du Burkina Faso, reprend lundi. Un ajournement de deux semaines avait été demandé par les avocats de la défense afin de mieux étudier le dossier. Blaise Compaoré, principal accusé, n’y participera pas. L’ancien président, exilé en Côte d’Ivoire, sera jugé par contumace.
Le procès des auteurs présumés de l’assassinat de Thomas Sankara, tué à l’âge de 37 ans lors du coup d’État du 15 octobre 1987 à Ouagadougou, recommence lundi 25 octobre. Il avait démarré brièvement deux semaines plus tôt avant d’être ajourné.
Deux avocats commis d’office de la défense avaient demandé un report du procès d’un mois « au nom de la manifestation de la vérité », arguant avoir eu trop peu de temps pour étudier « les 20 000 pièces du dossier ». Urbain Méda, président du tribunal militaire de Ouagadougou, avait accepté de suspendre les débats, mais pour un délai de seulement deux semaines. Désormais, la justice burkinabè doit se pencher pour de bon sur ce dossier majeur de l’histoire du « pays des hommes intègres ».
Quatorze personnes doivent être jugées mais deux sont absentes, et non des moindres : Blaise Compaoré, l’ancien président du Burkina Faso (1987-2014) et ami de Thomas Sankara, et Hyacinthe Kafando, ancien adjudant-chef de la garde de Compaoré. Le premier est soupçonné d’avoir commandité l’assassinat de celui qui était surnommé le « Che Guevara africain« . Le second est accusé d’avoir été à la tête du commando qui fit 12 morts ce 15 octobre 1987, lors d’une réunion au siège du Conseil national de la révolution (CNR) dans la capitale.
Chassé du pouvoir par une insurrection populaire le 31 octobre 2014, Blaise Compaoré, 70 ans, a trouvé refuge en Côte d’Ivoire, pays dont il a obtenu la nationalité. Le 11 octobre, avant l’ajournement du procès, Mariam Sankara, la veuve de Thomas Sankara, l’accusait d’avoir organisé « un crime, un assassinat prémédité », et réclamait qu’il se présente face au tribunal militaire.
« C’est lui qui a profité de la situation. On ne peut pas dire qu’il est innocent. (…) Il devrait venir répondre devant la juridiction burkinabè. Il faut que la culture de l’impunité et de violence politique qui sévit dans certains pays africains, malgré la démocratie de façade, s’arrête définitivement. C’est ce que j’attends », avait confié Mariam Sankara à Nicolas Germain pour France 24.
Toutefois, et comme attendu, Blaise Compaoré ne sera pas présent au tribunal, tout comme Hyacinthe Kafando. Me Pierre-Olivier Sur, l’avocat de l’ancien chef d’État, l’a confirmé à nos confrères de RFI :
« Le dossier, on ne l’a toujours pas, et donc, nous sommes dans l’impossibilité de le défendre dans le cadre de ce que l’on appelle un procès équitable. Qui accepterait d’ailleurs qu’un avocat puisse arriver à un procès sans qu’on lui ait notifié les charges reprochées à son client et sans qu’il ait pu avoir accès au dossier (…). C’est un simulacre de procès. On ne peut pas nous accuser de lâcheté à ne pas nous présenter au procès dès lors qu’on n’a pas reçu la copie du dossier. »
Du côté des familles des victimes du 15 octobre 1987, on s’attend à ce que cette reprise de procès soit marquée par de nouvelles tentatives de la défense d’obtenir un renvoi, voire une annulation de la procédure.
Avec RFI