Interviews du nouvel homme fort du Niger : Le général Tiani critique la Cedeao et s’exprime sur la transition et le départ des troupes françaises

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(« Le peuple nigérien va désormais dicter la forme des futures relations avec la France », dit-il)

Premier exercice du genre pour le chef de la junte depuis le coup d’État du 26 juillet. Le général Abdourahamane Tiani a donné deux interviews samedi soir 30 septembre en haussa et en zarma à la télévision nationale Télé Sahel. Une nouvelle fois, il défend le coup d’État contre Mohamed Bazoum et s’exprime sur le départ prochain des troupes françaises. Il y a une semaine, le président français Emmanuel Macron a annoncé leur retrait d’ici à la fin de l’année des quelque 1 500 militaires présents au Niger. Et l’ambassadeur Sylvain Itté a quitté Niamey mercredi dernier

« Nous sommes dans les préparatifs en vue de leur départ », déclare le général Tiani. Désormais, selon le président de la transition, « c’est le peuple du Niger qui va dicter les relations futures avec la France. »

« L’ambassadeur français est parti il y a quelques jours. Les soldats français suivront bientôt sa trace. Plaise à Dieu, ils vont quitter le Niger. Les ressources du Niger appartiennent au peuple. Il y a des amis prêts à nous aider dans un politique gagnant-gagnant, dans le respect mutuel. La reprise de notre coopération avec la France dépend du peuple souverain. La colonisation est terminée. »

Pour lui, les militaires français n’ont pas tenu leurs promesses. « Non seulement ils n’ont pas chassé les terroristes, explique-t-il, mais les terroristes sont de plus en plus nombreux. »

Cette menace justifie le coup d’État d’il y a deux mois, selon le général Tiani. « Le pays risquait (…) de disparaître, nous avons décidé de prendre des mesures puisque les gens (au pouvoir) n’écoutaient pas leurs conseillers militaires ».

Autre reproche répété, « la dilapidation des deniers publics » par les dirigeants sous la présidence de Mohamed Bazoum.

Interrogé sur la suite de la transition annoncée pour durer trois ans maximum, le général Tiani assure : « Nous n’avons pas le droit de passer cinq années au pouvoir, il faut être élu pour cela ».

Tiani critique la Cedeao

Par ailleurs, le chef du régime a critiqué la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui a pris des sanctions politiques et économiques au lendemain du coup d’Etat et menacé le Niger d’une intervention armée.

La Cedeao « n’a même pas cherché » à « connaître les raisons » du coup d’Etat, a estimé le général, déplorant que « les populations souffrent de l’embargo ».

Fustigé par des pays occidentaux et africains, le régime nigérien s’est alors trouvé de nouveaux alliés comme le Mali et le Burkina, tous deux dirigés par des militaires

Tiani  a rappelé avoir créé avec eux une coopération de défense, l’Alliance des Etats du Sahel (AES), précisant qu' »un accord économique viendra(it) ensuite ».Risque d’effondrement du Sahel

« Comme ils (les Français) étaient là pour combattre le terrorisme et qu’ils ont unilatéralement arrêté toute coopération (…) leur séjour au Niger est arrivé à son terme », a déclaré Abdourahamane Tiani. « Ils ont dit qu’ils étaient venus pour aider à éradiquer le terrorisme. Non seulement ils n’ont pas chassé les terroristes mais les terroristes sont de plus en plus nombreux« , a-t-il déploré.

Le pays est miné à l’ouest et au sud-est par des attaques jihadistes récurrentes, perpétrées par des groupes liés à Al-Qaïda et à l’État islamique. De son côté, le ministre français des Armées Sébastien Lecornu a estimé vendredi que « le Sahel risqu(ait) de s’effondrer sur lui-même », suite au départ des soldats français du Mali et du Burkina Faso – également dirigés par des militaires – et bientôt du Niger.

« Nous avons été une solution pour la sécurité du Sahel », a-t-il insisté, non sans justifier une nouvelle fois son coup d’État par les attaques jihadistes. Le « pays risqu(ait) un jour de disparaître, nous avons alors décidé de prendre des mesures puisque les gens (au pouvoir sous Bazoum) n’écoutaient pas leurs conseillers militaires », a-t-il déclaré.

La France, par ailleurs, « n’est pas le seul pays avec lequel nous avons des relations culturelles », a-t-il ajouté, en réaction à la suspension de la délivrance de visas par Paris depuis le Niger, le Burkina Faso et le Mali.

« Dialogue national »

« Nous n’avons pas le droit de passer cinq ans au pouvoir, il faut être élu pour cela », a-t-il également assuré samedi soir, quelques semaines après avoir annoncé une transition de trois ans maximum.

Selon lui, « le problème ce n’est pas la démocratie, parfois ce sont les personnalités élues qui tordent le cou aux textes pour n’en faire qu’à leur tête ». Il a également justifié le coup d’État par « la dilapidation des deniers publics » par les anciens dirigeants. Le régime avait annoncé à ce sujet la création d’une commission de lutte contre la corruption.

Abdourahamane Tiani a rappelé la mise en place d’un « dialogue national » pour écrire de nouveaux textes régissant la vie politique nigérienne.

Depuis le coup d’État, le Niger fait l’objet de sanctions politiques et économiques de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui a menacé le pays d’une intervention armée.

Alliance sahélienne

Selon le général Tiani, cette organisation « n’a même pas cherché » à « connaître les raisons » du coup d’État. Il déplore que « les populations souffrent de l’embargo ». Fustigé par des pays occidentaux et africains, le régime nigérien s’est trouvé de nouveaux alliés, le Mali et le Burkina.

Abdourahamane Tiani a rappelé avoir créé avec eux une coopération de défense, l’Alliance des États du Sahel (AES), précisant qu’« un accord économique viendra(it) ensuite ».

Mohamed Bazoum, séquestré depuis le coup d’État dans sa résidence présidentielle, et à qui Emmanuel Macron a réaffirmé son soutien, a saisi la Cour de justice de la Cedeao pour sa libération.

(Avec AFP et RFI)