Le Kenya et Haïti ont signé ce 1er mars 2024 un accord pour l’envoi de policiers kényans dans le pays caribéen, gangréné par les gangs, dans le cadre d’une mission internationale soutenue par les Nations unies, selon un communiqué signé par le président kényan William Ruto. Le communiqué ne précise pas si cet accord est contraire à la décision d’un tribunal kényan ayant jugé illégal fin janvier l’envoi prévu de policiers.
Alors que Haïti, gangrené par la violence des gangs, attend un déploiement dans le cadre d’une mission internationale soutenue par les Nations unies fin janvier, un tribunal de Nairobi avait jugé le déploiement de policiers kényans en Haïti « inconstitutionnel, invalide et illégal ». Entre autres, car il n’y avait pas d’accord de réciprocité signé entre les deux pays.
C’est chose faite aujourd’hui, d’après le communiqué du chef de l’État kényan, rapporte notre correspondante à Nairobi, Albane Thirouard. Le chef de l’État kényan et le Premier ministre haïtien Ariel Henry, en déplacement à Nairobi, ont « discuté des prochaines étapes pour permettre l’accélération du déploiement », selon le communiqué. Ce dernier ne précise pas si cet accord est contraire à la décision du tribunal kényan.
Pour Ariel Henry le déploiement prochain de troupes internationales emmenées par Nairobi offre une perspective de jours meilleurs aux Haïtiens : « Cette mission apporte un espoir pour le futur, un espoir pour tous ceux qui ne peuvent pas entrevoir le lendemain, qui ne savent pas comment ils vivront le lendemain, qui n’ont pas l’assurance de rentrer chez eux quand ils sortent. Monsieur le président, merci et merci à tous ceux impliqués dans cette mission sous votre commandement. »
Pour le président Ruto, ce déploiement en Haïti est « un devoir historique », réitérant l’engagement du Kenya au sein de la force multinationale, dont les préparatifs ont déjà commencé.
«C’est une mission pour l’humanité. Une mission en solidarité avec nos frères et sœurs en Haïti. Nous, Kényans, avec nos frères et sœurs des autres pays qui ont gracieusement accepté de faire partie de cette mission, de fournir des policiers, des équipements et d’autres moyens, y compris financiers, répondent aux pleurs des enfants qui veulent aller à l’école, aux femmes qui veulent aller à l’hôpital et trouver des médicaments, aux jeunes qui veulent poursuivent leur carrière et aux acteurs économiques qui veulent poursuivre leur activité. Nous réponds à cet appel parce que c’est ce qui est juste, c’est ce que l’humanité se doit de faire pour l’humanité», déclare le président kényan William Ruto annonce «un accord pour l’humanité» pour le déploiement de troupes en Haïti.
Cela ne garantit pas pour autant son déploiement. Tout d’abord car Nairobi avait indiqué il y a quelques mois que l’envoi de ses policiers était lié à la réception des fonds nécessaires à la mission. Le Kenya estime à 600 millions de dollars le budget total nécessaire pour un an, dont à peine la moitié serait réunie actuellement.
Et puis, une nouvelle procédure judiciaire n’est pas à exclure. Ekuru Aukot, l’un des avocats à l’initiative du précédent recours, a déjà expliqué qu’il remettait en question la légitimité du gouvernement haïtien à signer un tel accord, alors que le pays ne compte plus aucun représentant élu au niveau national.
Le Parlement kényan avait validé ce déploiement avant que celui-ci ne soit bloqué par la décision de justice fin janvier. Le gouvernement avait alors annoncé son intention de faire appel.
Face aux demandes de plus en plus pressantes du gouvernement haïtien et de l’ONU, le Kenya avait accepté en juillet 2023 de mener une force de 2 500 à 2 600 hommes, espérée « au cours du premier trimestre 2024 », selon la représentante spéciale adjointe de l’ONU en Haïti.
Plusieurs pays ont annoncé leur soutien à cette force multinationale, notamment plusieurs pays latino-américains comme la Jamaïque, les Bahamas. Le Bénin a aussi proposé en début de déployer 2 000 soldats au sein de cette mission.
Mais pour William Ruto, il faut plus de mobilisation : « Je demande a tous les autres partenaires à travers le monde de sauter le pas, pour que nous puissions fournir une réponse dans les meilleurs délais, qui aidera Haïti et le Kenya a faire en sorte que nous vivons tous dans un monde qui offre a chacun les mêmes chances de s’accomplir », a-t-il prononcé dans un discours.