Après 30 ans de carrière d'artiste chanteur : Ignace Don Métok fait des confidences

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L’artiste chanteur Ignace Don Métok célèbre ses trente (30) ans de carrière, samedi 24 août 2024, à Canal Olympia à Cotonou. Pour l’heure, les préparatifs vont bon train et il a voulu s’accorder exclusivement à Matin Libre pour fournir des détails sur comment ça va se passer.

Il en a profité pour remonter un peu le temps afin de retracer légèrement la trajectoire de sa carrière depuis le début jusque-là. A l’occasion, il se fera accompagner sur la scène par les Sphinx Forever avec l’appui de la maison de production JSR. Lire l’intégralité de l’entretien.

Il y a trente (30) ans, l’artiste chanteur Don Métok a fait ses premiers pas dans l’univers de la musique béninoise. A la veille de cette grande célébration, quel est le sentiment qui vous anime ?

Ignace Don Métok : c’est un sentiment de fierté tout simplement. J’ai été moi-même surpris de savoir que j’ai déjà fait trente (30) ans dans ce système. C’est si vite passé que je ne m’en suis pas rendu compte. J’en parle avec beaucoup d’honneur, beaucoup de fierté, beaucoup d’émotion.

Parce que quand on avait commencé, on ne savait pas où on allait. C’est vrai qu’on avait beaucoup de rêves mais on ne peut pas dire avec exactitude ce qui nous attendait. Et chemin faisant, nous avons connu beaucoup de hauts et de bas. Mais on a tenu bon grâce à vous autres journalistes qui étiez là à jouer nos sons et à nous encourager chaque fois en nous invitant sur vos émissions. Et beaucoup l’on également fait avant vous.

C’est ainsi que nous nous sommes dit que si nous avons tant de monde derrière nous, il fallait poursuivre sans relâche. Ce qui nous a amenés là où nous sommes actuellement. J’ai vu des gens fêter cinq (5) ans, dix (10) ans voire quinze (15) ans de carrière, moi ça ne m’intéressait pas. Il y en a d’autres même qui m’ont contacté pour me dire : tu ne veux pas fêter tes vingt (20) ans de carrière et je leur ai dit : ça ne m’intéresse pas.  Ce n’est pas important. Le plus important, c’est de continuer à produire du bon son et de continuer à faire plaisir à son public. Donc, je n’ai jamais imaginé fêter des anniversaires de carrière.

Mais qu’est-ce qui est arrivé cette année ?

C’est ce que je m’en vais vous dire. Donc, après trente ans, j’ai rencontré mes aînés de l’orchestre Sphinx de Gbégamey, puisque j’ai fait le CEG Gbégamey et avec cet orchestre-là, nous étions en train de discuter quand ils ont commencé par parler de la célébration des 60 ans du Collège et aussi des 50 ans de l’orchestre. J’ai remonté un peu le temps pour voir quand est-ce que j’ai intégré le groupe et c’est là que je me suis rendu compte du fait que j’ai déjà banalement fait trente ans de scène.

Alors, que faut-il faire ? j’ai décidé de m’arrêter pour rendre grâce à Dieu. Tout simplement parce que nous avons connu des gens qui, tout comme nous, avaient commencé mais n’ont pas survécu. Dans mes débuts, j’ai connu Baba Djala, paix et lumière sur lui aujourd’hui. Mais il n’est plus.  Donc, il faut nécessairement rendre grâce au Seigneur, pour lui dire merci de nous avoir permis de tenir bon jusqu’ici et ceci sur une bonne trentaine d’années. C’est vrai tous les rêves et objectifs n’ont pas été atteints, mais je pense que quand on regarde dans le rétroviseur au moins c’est à 80%.

Et personne ne pourrait jamais atteindre tous les objectifs de sa vie. Et donc, aujourd’hui, je suis tellement fier du chemin parcouru, et de ce que j’ai laissé, parce que je pense que beaucoup de personnes m’ont suivi et j’ai pu servir à quelque chose au sein de la société. Je ne vous raconte pas, un jour, alors que j’étais sur un vol pour Paris, il y a eu juste à côté de moi, un couple mixte, un noir et une blanche. Et qu’est-ce qui se passe ? le monsieur me regardait avec insistance et à chaque fois que je tourne mon regard nos yeux se croissaient et j’étais obligé de regarder dans ma direction.

Mais un moment après le monsieur s’est rapproché et me salue gentiment puis me demande de venir pour qu’il me présente sa femme. Alors je me suis rapproché et il demande à sa femme si elle me connait et la femme avec beaucoup d’hésitation répond non et ajoute « mais son visage semble me dit quelque chose ». Puis le monsieur lui faisait savoir que c’est celui qu’on appelle Ignace Don Métok. Mais le clou de l’histoire ce n’est pas encore ça. Le clou même de l’histoire, selon le récit du monsieur, est qu’il se fait que c’est l’une de mes chansons, ‘’Adjolomi Sènan’’, qui a permis au monsieur de conquérir le cœur de cette dame.

Le jour-là, quand le monsieur affirmait ça, j’étais très ému et la dame a sauté dans mes bras avec les larmes aux yeux avec une émotion accentuée, moi-même je ne m’en revenais pas. Et la deuxième que je vais raconter pour finir c’est celle-ci. Un jour, alors que je venais de finir l’animation d’une cérémonie de mariage, à la fin de ma prestation, une dame est allée me voir pour me tendre un papier. Lorsqu’elle avançait vers moi, j’avais cru qu’elle venait pour prendre une photo avec moi. Mais elle me tend un papier. Puis elle me disait ceci, « je souhaite que souvent, vous composez vos morceaux avec des phrases comme celles que j’ai inscrites sur la feuille ».

Et quand j’ouvre la feuille, je découvre : « Mon chéri soit moi fidèle, je te veux pour moi tout seul, chéri ne me trompe pas, j’en mourrais si je l’apprends, j’ai besoin de tes bisous et pas seulement de tes bijoux, j’ai besoin de ta présence et pas seulement de ton argent, j’ai besoin, oui, de toi mais tu es trop occupé… » Là, j’ai compris que c’est une dame qui est en détresse et souffrait alors même qu’elle a visiblement tout ce qu’il lui faut. Et donc, une fois à la maison, ce bout de texte a donné lieu au morceau que vous écoutez tous les jours et qui est intitulé ‘’Si c’est vrai que’’. Donc en trente ans, je peux être fier de dire que j’ai servi à quelque chose dans la société.

Alors les débuts de Don Métok remontent à quand ?

Dans les années 1989. Nous faisions notre petit bonhomme de chemin dans les bars. On ne chantait pas pour l’argent. Mais on avait du plaisir d’entonner des morceaux connus de tout le monde lorsque les promoteurs nous donnaient l’opportunité. La passion était à un niveau où on ne pouvait se dérober à aucune occasion qui s’offrait à nous à l’époque de prendre le micro pour chanter devant la multitude de personnes qui remplissaient les bars à l’époque.

On n’était très content lorsque les gens nous applaudissaient quand on mimait sur les chansons et on gesticulait pour montrer qu’on maîtrise le morceau de tel ou tel autre artiste. Je faisais aussi les cabarets. Parfois même, on priait pour avoir l’opportunité d’interpréter un ou deux morceaux au moins, surtout à l’approche des fêtes de fin d’année. Ce n’était pas pour autant qu’on avait la vocation de devenir artiste. Non. Ce qui est sûr, faire carrière dans la musique en ce moment là n’était pas encore du tout affiché. J’étais beaucoup plus footballeur à l’époque.

L’idée de devenir artiste musicien chanteur a commencé par germer lorsque j’ai intégré l’orchestre ‘’Les Sphinx’’ Gbégamey. C’est quand j’ai intégré ce groupe que j’ai pris la mesure de ce que je faisais. Et c’est là où j’ai compris que ça pouvait aller plus loin. Puisque lors des récitals je chantais bien et les gens ovationnaient. Parce que j’apprenais les chansons et je les exécutais avec perfection. Et donc dans les années 1992 à la télévision nationale, il y avait une dame qui s’appelle Valerie Etèka qui avait initié un concours inter-collèges qui s’appelait vedette en herbe.  Moi j’étais à Gbégamey avec les ‘’Sphinx’’ et nous avons participé. Ça eu lieu à l’ex hôtel Sheraton.

Il y avait 10 collèges qui ont participé et j’étais sorti troisième. Mais ce qui m’a surpris est que toutes mes sorties étaient fortement ovationnées sauf que c’est le troisième prix qui m’a été donné. J’ai constaté que le public n’était pas d’accord, mais de ma position je savais pourquoi on ne m’a pas donné le premier prix. C’est parce qu’il fallait interpréter un morceau de chez nous. Et moi j’ai interprété John Bri de l’ivoirien Serge Kassi. Alors que le premier avait lui interprété Stan Tohon et la deuxième, Angélique Kidjo. Donc quand je suis sorti de l’hôtel où a eu lieu la compétition pour rentrer chez moi avec le cadeau qui m’a été remis, je marchais quand j’ai senti la main d’une dame sur mon épaule qui me disait « mon garçon félicitations.

Le prix que vous avez eu ne reflète pas votre talent. Vous pouvez faire mieux. Vous irez très loin ». Quand j’ai tourné la tête qui ai-je vu ? j’ai vu madame Osséni Koubourath. Celle que vous connaissez, la ministre et chancelière.  Ce que je venais d’entendre d’elle était plus fort que moi. Et ça m’a donné un déclic et je me suis dit : je peux faire mieux. C’est en ce moment que je me suis dit si l’occasion se présente encore une prochaine fois pour ce concours je prendrai le premier prix. Et l’année suivant j’ai encore eu le privilège d’être le représentant du Collège Gbégamey toujours avec les sphinx et en partant j’ai dit à mes amis cette fois-ci je ramène le premier prix. Et c’est comme ça la finale a encore eu lieu dans un espace privé de la place et la présidente du jury était Angélique Kidjo, Nel Oliver était le vice-président du jury et Steve Facia était à l’animation. Je vous assure c’était la totale. J’ai fait l’interprétation…

De quel morceau déjà ?

Vous savez, je suis un têtu inh. J’ai fait encore un morceau étranger, une chanson d’Alpha Blondy. Mais quand j’ai exécuté, on ne dirait pas qu’on était à une compétition. Le public s’est levé et disait bissé, bissé, bissé. Même mes autres challengers qui étaient encore dans les coulisses étaient stressés. Il y en avait qui disaient même nous on ne sait plus quoi chanter, il a gâté le coin. C’est comme ça Steve fait un tour dans les coulisses puis il me voit et il dit toi là tu as déjà pris le trophée inh. Effectivement à la délibération, la grande sœur Angélique Kidjo a pris le micro et a commencé par annoncer les résultats à partir de la dixième place. Arrivé au niveau de la première place, elle garde un peu le suspense puis elle déclare « le premier nous vient du CEG Gbégamey ». Et c’est comme ça j’ai relevé le premier grand défi de ma carrière.  Et donc toute la compétition était diffusée sur la télévision nationale. Donc de vénérée mémoire, André Debery Quenum, le patron de Musi-germe, a suivi et m’a récupéré entre 1993-1994. Avec lui, j’ai eu mon premier single et tout est partie de là. C’est comme ça ma véritable carrière a pris son envol. Et j’en suis à célébrer 30 ans aujourd’hui.

Réalisé par Teddy GANDIGBE (Matin Libre)

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