Le président Vladimir Poutine a obtenu 87,47% des voix à l’élection présidentielle russe, selon la Commission électorale du pays. Ce résultat encore provisoire a été délivré sur la base du dépouillement des bulletins de 36,3% des bureaux de vote. Comme attendu dans ce scrutin sans suspense, le maître du Kremlin se dirige vers un plébiscite.
« Soutien colossal », « consolidation incroyable » de la société. La télévision russe multipliait les superlatifs pour décrire la victoire du chef de l’État, après une élection dont l’opposition avait été exclue après une répression sans merci.
Ce plébiscite marque un record pour celui qui avait toujours recueilli entre 64 et 68 % des suffrages aux scrutins précédents. Le pouvoir avait martelé au préalable que le peuple russe devait être « uni » derrière son leader, présentant le conflit ukrainien comme ourdi par les Occidentaux pour détruire la Russie. L’assaut contre l’Ukraine, déclenché par le maître du Kremlin en février 2022 et qui n’a pas d’issue en vue malgré ses dizaines de milliers de morts, était quant à lui en toile de fond du vote, d’autant que les attaques sur le territoire russe se sont multipliées cette semaine.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que Vladimir Poutine était un homme « ivre de pouvoir » qui veut « régner éternellement ». « Il est clair pour tout le monde que ce personnage, comme cela s’est produit si souvent dans l’histoire, est tout simplement ivre de pouvoir et fait tout ce qu’il peut pour régner éternellement », a déclaré Volodymyr Zelensky dans un message sur les réseaux sociaux, estimant que la présidentielle russe n’a « aucune légitimité ».
Le ministre des Affaires étrangères du Royaume-Uni David Cameron a déploré dimanche l’absence d’élections « libres et équitables » en Russie, dans un message posté sur X (ex-Twitter). Le chef de la diplomatie britannique a dénoncé « l’organisation illégale d’élections sur le territoire ukrainien, l’absence de choix pour les électeurs », et « l’absence de contrôle indépendant de l’OSCE », l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
Pas de place à la contradiction
En Russie, les autorités n’ont pas laissé de place aux contradicteurs du pouvoir : les trois autres candidats sélectionnés étaient tous dans la ligne du Kremlin, qu’il s’agisse de l’Ukraine ou de la répression qui a culminé avec la mort d’Alexeï Navalny dans une prison de l’Arctique en février. Dans ce contexte, l’épouse du défunt détracteur numéro un de Vladimir Poutine, Ioulia Navalnaïa, avait appelé ses partisans à se montrer en nombre en allant tous voter au même moment, à midi dimanche, contre le président russe. Elle-même a voté après plusieurs heures d’attente dans une foule immense à l’ambassade de Russie à Berlin.
Devant de nombreuses autres ambassades russes, des foules importantes sont allées voter à midi à travers le monde, des dizaines de milliers de Russes s’étant exilés depuis le début de l’assaut contre l’Ukraine à cause de la répression et de la peur d’être mobilisés dans l’armée. L’équipe d’Alexeï Navalny a déclaré que le score obtenu par Vladimir Poutine à la présidentielle russe n’avait « pas de lien avec la réalité ».
Par endroits à Moscou, comme à Saint-Pétersbourg, des queues importantes se sont formées à l’heure dite. Mais devant d’autres bureaux de vote, l’affluence ne semblait pas particulièrement élevée. Dans le quartier moscovite de Marino, devant le bureau où Alexeï Navalny votait naguère, quelques dizaines de personnes ont répondu à l’appel.
La porte-parole de la diplomatie russe a, quant à elle, affirmé que les électeurs allés en masse aux ambassades, comme à Paris, Londres et Berlin, n’étaient pas des partisans de l’opposition. « Ils sont venus voter, saisissant l’opportunité que leur pays, la Russie, leur a offerte malgré toutes les menaces de l’Occident », a écrit sur Telegram Maria Zakharova.
Les hostilités en Ukraine se sont aussi invitées dans le scrutin. La semaine électorale a notamment été marquée par des frappes aériennes meurtrières et des tentatives d’incursion terrestre à partir de l’Ukraine sur le territoire russe, répliques aux bombardements et assauts quotidiens de la Russie contre sa voisine depuis plus de deux ans.
Avec RFI