« On ne m’enlèvera pas de l’idée que [ce n’est pas] une simple coïncidence cette attaque des Américains et la réaction de l’UEFA et de M. Platini », explique Blatter, à peine réélu pour un 5e mandat à la présidence de la Fifa.
Accusations « choquantes » de la justice américaine alors que les Etats-Unis n’ont pas eu le Mondial-2022, « haine » venue de l’UEFA présidée par Michel Platini : Joseph Blatter, à peine réélu pour un 5e mandat à la présidence de la Fifa, règle ses comptes.
Juste après sa réélection à 79 ans vendredi 29 mai pour un mandat de quatre ans, Blatter a livré une interview à la télévision suisse RTS où il dégaine à tout va. Le Suisse, président depuis 1998, se dit d’abord « choqué » par les accusations de Loretta Lynch, la ministre de la Justice des Etats-Unis, envers la Fifa, ébranlée cette semaine par une tempête judiciaire.
Celui qui est entré à la Fifa il y a 40 ans ne digère pas le coup de filet dans un hôtel de luxe de Zurich (sept responsables de la Fifa arrêtés) à deux jours du Congrès électif de son instance.
« Cette affaire ne sent pas bon »
« Il y a des signes qui ne trompent pas: les Américains étaient candidats à la Coupe du monde de 2022 et ils ont perdu (…) Si les Américains ont à faire avec des délits d’argent ou de droit commun qui concernent des citoyens nord ou sud-américains, qu’ils les arrêtent là-bas, mais pas à Zurich alors qu’il y a un Congrès ».
Et de lancer : « N’oublions pas qu’ils [les Etats-Unis] sont le sponsor numéro un du Royaume hachémite, donc de mon adversaire [battu, le prince jordanien Ali bin Al Hussein], cette affaire ne sent pas bon ». En tout cas, la justice américaine n’entend pas s’arrêter là. « Je suis plutôt confiant dans le fait qu’il va y avoir une nouvelle vague d’inculpations », a confié au New York Times le patron de la cellule enquêtes criminelles du fisc américain, l’IRS, Richard Weber, selon qui « il y a d’autres personnes et d’autres sociétés impliquées dans des actes criminels ». Enfin, Blatter n’oublie pas non plus l’attitude des médias anglais, avec des titres hostiles à son égard (« Tu as tué le football », par exemple), alors que « les Anglais étaient candidats à la Coupe du monde 2018 et [qu’]ils ont perdu ».
« On ne m’enlèvera pas de l’idée que [ce n’est pas] une simple coïncidence cette attaque des Américains et la réaction de l’UEFA et de M. Platini », tonne le président réélu de la Fifa. Blatter dénonce ainsi une « haine, venue non pas seulement d’une personne à l’UEFA, mais d’une organisation, l’UEFA, qui n’a pas compris qu’en [1998] je suis devenu président ».
« Je pardonne à tout le monde, mais je n’oublie pas »
Interrogé sur Michel Platini, président de l’UEFA qui lui avait demandé en personne de démissionner jeudi, le patron du football mondial répond : « je pardonne à tout le monde, mais je n’oublie pas ». Concernant les relations futures avec l’UEFA, Blatter tempère toutefois : « Il faudra continuer avec Platini et l’UEFA. Nous ne pouvons pas vivre sans l’UEFA et l’UEFA ne peut pas vivre sans nous ».
L’ambiance risque d’être un peu fraîche au sein du comité exécutif, gouvernement du foot mondial, où se trouvent Blatter et Platini, qui se réunit samedi matin au siège de la Fifa pour répartir les places par Confédérations (peu ou prou les continents) pour les Mondiaux 2018 en Russie et 2022 au Qatar.
Démissioner ? « C’est dire je suis fautif »
Quand le journaliste souligne que, dans des grandes multinationales, le PDG démissionne lorsque des membres du conseil d’administration sont arrêtés dans une affaire de corruption, Blatter reste ferme. « Pourquoi je démissionnerais ? C’est accepter, c’est dire je suis fautif de tout ce qui arrive, moi je lutte depuis 2011 [précédente réélection] avec nos différentes commissions [au sein de la Fifa]contre toute corruption », se défend-il.
« Si vous regardez la composition du comité exécutif de la Fifa en décembre 2010 et celle d’aujourd’hui, la moitié n’est plus là », donne-t-il comme preuve de son action. Le 2 décembre 2010, le comité exécutif de la Fifa avait attribué les Mondiaux 2018 et 2022 à la Russie et au Qatar. Depuis les accusations de corruption, complétées désormais par des actions judiciaires américaine et suisse, n’en finissent pas.