Les grands créanciers internationaux sont parvenus à un accord pour instaurer un moratoire sur la dette des pays les plus pauvres, a annoncé mardi 14 avril le ministre français de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire.
Bruno Le Maire, qui s’exprimait à l’occasion d’un point de presse téléphonique en amont des réunions de printemps de la Banque Mondiale et du Fonds monétaires international (FMI) ainsi que de la réunion du G20, a précisé qu’une grande majorité d’Etats africains seraient éligibles à ce dispositif.
Le moratoire concerne 20 milliards de dollars de dettes détenues par les créanciers bilatéraux et les créanciers privés.
De son côté, le FMI a annoncé hier des fonds d’urgence à un certain nombre de pays en développement et à faible revenu, emboîtant le pas de mesures prises par la Banque mondiale. Des mesures financières qui, directement et indirectement, impactent les filières agricoles, agroindustrielles, la consommation et le monde rural.
S’agissant des pays d’Afrique de l’Ouest, le FMI et/ou la Banque allouent $ 5 millions au Cap Vert (BM), $ 10 millions à la Gambie (BM), $ 1milliard du FMI et $ 35 millions de la Banque au Ghana, $ 442 millions du FMI et $ 20 millions de la Banque au Sénégal et $ 7,5 millions à la Sierra Leone (BM).
$ 1,035 milliard au Ghana
L’importance des montants accordés notamment par le Fonds au Ghana s’explique par le risque très élevé lié à son endettement. Ceci devrait permettre à Accra de traiter d’urgence les dossiers fiscaux et de balance des paiements, mais aussi servir de levier pour lever des fonds auprès d’autres bailleurs.
Que va faire la Chine ?
Hormis les institutions de Bretton Woods, dans le cadre des négociations cette semaine sur la dette africaine, les yeux sont rivés sur la Chine qui, au fil des dernières années, est devenue le premier bailleur du continent.
On s’attend à ce que Pékin gèle les remboursements mais il semble improbable qu’elle annule les dettes comme l’ont fait par le passé de nombreux bailleurs occidentaux, confient à Reuters deux sources proches du dossier.
En effet, rappelons que la Chine est elle-même un pays émergent, ce qui expliquerait que Pékin soit prudent dans ses annonces : le revenu par tête d’habitant en Chine était de $ 10 153 en 2019 contre $ 45 447 dans les sept premières économies de la planète, selon des données du FMI. Or, pour la première fois en trois décennies, sa propre économie va se contracter suite au coronavirus, après le ralentissement déjà constaté l’année dernière. Pékin a déjà fait comprendre notamment au FMI, la semaine dernière, qu’elle aimerait travailler sur une base bilatérale avec les gouvernements africains, comme à son habitude.
Rappelons que contrairement à ceux qui ont déjà accordé des remises de dettes à l’Afrique par le passé, une part importante de la dette chinoise est une dette à des conditions commerciales. Entre 2000 et 2017, la Chine (gouvernement, banques, entreprises) aurait prêté environ $ 143 milliards à l’Afrique, essentiellement pour financer d’importants projets d’infrastructures, selon des données de l’Université américaine de John Hopkins sur lesquelles s’appuie Reuters dans son article.
Selon l’Overseas Development Institute (ODI) à Londres, 10% du service de la dette du Nigeria va à la Chine. En général, les institutions chinoises ont accord peu de dons, les périodes de grâce sont plus courtes et les taux d’intérêt en moyenne sont de l’ordre de 4,14% contre 2,1% pour les prêts de la Banque mondiale.
Par ailleurs, hier, le roi du Maroc, Mohammed VI, a proposé de lancer une initiative africaine pour combattre le Covid-19. Une initiative dont il s’est entretenu téléphoniquement avec les présidents du Sénégal et de Côte d’Ivoire, et qui consisterait à un partage d’expérience et des meilleures pratiques pour aborder l’impact médical, économique et social de la pandémie.
Hier aussi, le Nigeria a annoncé la prolongation du confinement à Lagos et dans les Etats de Lagos, Abudja et Ogun pour 14 jours.
(Avec Reuters)