(Voici l’intégralité de la décision DCC 20-364 du 27 février 2020 )
Les anciens présidents Nicéphore SOGLO et Thomas Boni YAYI « n’ont pas violé la constitution ». Ainsi en a décidé la Cour constitutionnelle du Bénin qui a rejeté cet après-midi du jeudi 27 février 2020, le recours de Monsieur Alain Diogo. Le requérant accuse ces deux anciens président de la République de complicité dans la décision du gouvernement nigérian de fermer toutes les frontières. La Haute juridiction a également dit le droit en déclarant son incompétence à juger le chef de l’Etat de la République Fédérale du Nigéria, Mohamed BUHARI. Lire l’intégralité de la décision…..
DECISION DCC 20-364 DU 27 FEVRIER 2020
La Cour constitutionnelle,
Saisie d’une requête en date à Cotonou du 31 octobre 2019, enregistrée à son secrétariat le Il novembre 2019 sous le numéro 1915/328/ REC-19, par laquelle monsieur Alain DIOGO, chef de l’entreprise DIOGO et Fils, domicilié à Cotonou, 03 BP 499, forme un recours contre la fermeture par la
République fédérale du Nigéria de sa frontière avec le Bénin et, contre les anciens Présidents de la République, messieurs Thomas Boni YAYI et Nicéphore D. SOGLO, pour leurs implications respectives dans cette fermeture;
Vu la Constitution;
Vu la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée le 31 mai 2001 ;
Vu le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle;
Ensemble les pièces du dossier ;
Ouï monsieur Joseph DJOGBENOU en son rapport;
Après en avoir délibéré,
Considérant que monsieur Alain DIOGO expose que depuis le 21 août 2019, le Chef de l’Etat de la République fédérale du Nigéria a ordonné la fermeture de la frontière entre cet Etat et la
République du Bénin; que c’est alors que messieurs Thomas Boni YAYI et Nicéphore D. SOGLO, tous anciens présidents béninois, ont saisi cette occasion pour tenter de remettre en cause la crédibilité des élections législatives du 28 avril 2019; qu’en agissant ainsi, les intéressés ont méconnu la Constitution;
I-Sur la compétence à l’égard d’un Chef d’Etat étranger
Vu le préambule de la Constitution;
Considérant que dans le texte du préambule de la Constitution, le peuple béninois affirme sa « volonté de coopérer dans la paix et l’amitié avec tous les peuples qui partagent [ses] idéaux de liberté, de justice, de solidarité humaine, sur la base des principes d’égalité, d’intérêt réciproque et de respect mutuel de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale»; que cet objectif constitutionnel a pour effet nécessaire et prioritaire l’immunité et l’inviolabilité aussi bien diplomatique que juridictionnelle des représentants des peuples des Etats étrangers; qu’il en est d’autant plus ainsi qu’une autorité de
l’Etat, notamment le chef de l’Etat, ne saurait être soumise à aucune forme de contrainte venant d’un autre Etat; que l’exclusion de la soumission d’un chef d’Etat étranger à la souveraineté juridictionnelle d’un autre Etat, consécutive au principe de coopération dans la paix et l’amitié des peuples est fondée dans la souveraineté des Etats ;
Considérant qu’ainsi, le recours qui, comme en l’espèce, vise le chef de l’Etat de la République fédérale du Nigéria se heurte de ce chef à l’incompétence de la haute juridiction à en connaître ;
II- Sur la violation de la Constitution par Messieurs Thomas Boni YAYI et Nicéphore D. SOGLO
Vu les articles 15 et 23 de la Constitution et 6 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples ;
Considérant que les libertés publiques visées par ces textes ne peuvent être limitées que par des dispositions législatives; qu’en l’espèce, il n’est pas établi que l’usage fait par Messieurs Thomas Boni YAYI et Nicéphore D. SOGLO de leur liberté d’expression et d’opinion ait violé une restriction fixée par le législateur; qu’il y a lieu de dire qu’il n’y a pas violation de la Constitution;
EN CONSEQUENCE,
Dit que la Cour est incompétente en ce qui concerne le Chef de l’Etat de la République fédérale du Nigéria.
Dit qu’il n’y a pas violation de la Constitution en ce qui concerne messieurs Thomas Boni YAYI et Nicéphore D. SOGLO.
La présente décision sera notifiée à monsieur Alain DIOGO et publiée au Journal officiel.
Ont siégé à Cotonou, le vingt-sept février deux mille vingt,
Messieurs Joseph DJOGBENOU Président
Madame Cécile Marie José de DRA VO ZINZINDOHOUE Membre
Messieurs André KATARY Membre
Fassassi MOUSTAPHA Membre
Sylvain M. NOUWATIN Membre
Rigobert A. AZON Membre