L’Agence Béninoise de Gestion des Espaces Frontaliers (ABéGIEF) organise du 6 au 12 juin 2019, la 6ème édition de la Semaine des Frontières Béninoises (SFB). Une célébration qui fait un focus sur la précarité des conditions de vie des populations frontalières en vue de susciter la réaction de leurs compatriotes qui vivent au centre. La conférence de presse inaugurant le démarrage des activités a eu lieu jeudi 6 juin 2019 à Azalaï hôtel.
L’Agence Béninoise de Gestion des Espaces Frontaliers (ABéGIEF) lance une mobilisation nationale au profit des espaces frontaliers. Le challenge consiste à poursuivre la dynamique d’information, de sensibilisation de tous les acteurs concernés et du grand public et susciter la contribution de toutes les parties prenantes à l’atteinte des résultats du Plan National de Développement des Espaces Frontaliers.
« Viabilisation des espaces frontaliers pour une meilleure sécurisation du territoire national ». C’est le thème de la 6ème édition de la Semaine des Frontières Béninoises (SFB).
En effet, en dépit des efforts consentis depuis une dizaine d’années par l’Etat béninois pour sauvegarder l’intégrité territoriale, garantir la souveraineté du Bénin, développer la citoyenneté chez les populations frontalières et promouvoir la coopération transfrontalière, beaucoup d’efforts restent à fournir, car les populations vivant dans ces zones ne bénéficient pas du minimum vital. Ce constat amène le Directeur Général de l’ABéGIEFà conclure : «les populations ont le sentiment d’être abandonnées à elles-mêmes car, on observe une absence totale d’infrastructures de toutes sortes. En mer, la situation n’est pas reluisante. Cet état de chose constitue un terreau fertile pour le développement de la grande criminalité, de la radicalisation et du terrorisme ».
Poursuivant dans cet ordre d’idées, le spécialiste des questions transfrontalières rappelle à l’attention de l’opinion nationale et internationale le modus operandis des terroristes. Il décline à travers une pyramide, le processus de l’extrémisme violent (les différentes étapes par lesquelles prennent les populations pour intégrer les réseaux terroristes,Ndlr). « Le terrorisme naît de quelque part. Les terroristes recrutent dans les régions où il y a marginalisation, pauvreté, stigmatisation, frustration, sentiment d’abandon. Tout cela conduit à la révolte, puis à la radicalisation, ensuite à l’extrémisme violent pour finir dans le terrorisme ».
Cependant, des efforts ont été faits par le gouvernement du Bénin et l’espoir est encore permis en dépit du fait que le Bénin est entouré de pays instables. « Le Bénin a décidé d’investir dans la prévention en réduisant la précarité dans les zones frontalières. Cela a contribué en la construction de salles de classes, de commissariats, de forages, de hangars dans les marchés etc. ». Ces avancées renseigne-t-il, ont permis de renforcer le sentiment d’appartenance et de fierté des populations vivant dans les zones frontalières et favoriser le renseignement territorial, meilleur outil de lutte contre le terrorisme.
Il faut rappeler que comme il est de coutume depuis six (6) ans, le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Publique a délivré un message à la faveur de la Journée Africaine des Frontières (JAF) dans la matinée d’hier en son cabinet.
« Que chacun décide de faire quelque chose pour ces zones-là », dixit Marcel B. AYITE
Monsieur le Directeur général, que peut-on retenir de cette campagne nationale de mobilisation autour des espaces frontaliers ?
Marcel B. AYITE : « L’ABéGIEFvient de lancer cette mobilisation au profit des espaces frontaliers parce que nous avions très tôt remarqué que dans les espaces frontaliers, la pauvreté est telle que malgré tous les efforts que nous faisons, nous n’arrivons pas à résorber de façon significative cette pauvreté-là. Je vous donne un exemple ; ce n’est pas rare de voir, malgré les points d’eau que nous mettons à disposition de ces populations-là, il n’y a énormément de secteurs où il n’y a pas d’eau. Malgré ce que faitle gouvernement pour les écoles, le constat est le même. Même s’il y a d’école, il n’y a pas de logement pour le corps enseignant. Ils doivent parcourir des dizaines de kilomètres avant de trouver un logement un peu décent. Avec les réformes au niveau du secteur de la Santé, nombre de centres de santé qui servaient de mouroir ont fermé. Du coup, les populations se retrouvent sans centre de santé. Les populations se retrouvent aujourd’hui dans une urgence telle qu’on est obligé de lancer un SOS. Parce que vous vous retrouvez dans une région complètement déstabilisée par l’extrémisme violent. L’extrémisme violent trouve son lieu de confort dans les zones les plus déshéritées, les plus marginalisées. Or, il se trouve que des secteurs importants de notre pays se trouvent coupés du centre pendant cinq (5) mois au cours d’une année. Quand vous êtes à Ogamoin, lorsqu’il pleut, de juin jusqu’au mois de novembre, vous ne pouvez pas aller voir vos frères qui sont de l’autre côté. La seule sortie qu’il y a donne sur le Nigéria. Ce qui fait que les populations desdites zones sont complètement tournées vers les pays voisins. Du coup, lesentiment d’appartenance à la nation béninoise est assez faible à leur niveau.
Nous souhaitons qu’aujourd’hui, toute la nation béninoise prenne la résolution de faire un plan Marshall pour cette zone. Pour ceux qui ont quelques ressources que ce soit, que chacun choisisse de faire un geste pour ces espaces géostratégiques très sensibles de notre pays. C’est l’objectif de notre appel, de notre mobilisation pour les espaces frontaliers. Si on ne fait rien, d’autres viendront investir dans ces espaces. Et ce seront les terroristes. Aujourd’hui, on voit ce qui se passe à l’est du Burkina-Faso. Le gouverneur de cette région s’est échiné à rappeler l’impérieuse nécessité de viabiliser cette zone pourtant réputée très riche en or. Mais hélas ! Ces richesses sont exploitées par les terroristes pour financer leurs activités et ils ont assez de ressources pour prendre en charge nos compatriotes laissées pour compte.
Et pour ne pas accepter cela, il faut que chaque béninois se sente responsabilisé et qu’il dise : je suis frontière. Et toi ?
Comment peut-on contribuer à cette mobilisation ?
Les contributions à cette mobilisation se feront en nature. Nous avions souhaité que chacun décide de faire quelque chose pour ces zones-là. Même si c’est cinq cent (500) francs; Ça peut acheter cinq (5) cahiers de cent pages. Chacun donne ce qu’il a. Ceux qui ont les moyens peuvent construire des logements qu’on mettra en location pour les agents de l’Etat affectés dans ces zones.
Propos recueillis par C.E.D.