Europe : Les fuites au sein de l’armée allemande pointent le besoin criant de défenses antiaériennes de l’Ukraine

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La publication par la Russie d’une conversation non sécurisée de généraux allemands est une épine dans le pied pour Berlin, mais elle résonne chez ses alliés européens. Elle pointe le besoin criant de défenses antiaériennes de l’Ukraine, puisque les généraux allemands évoquaient la question de la livraison de missiles à longue portée Taurus. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a d’ailleurs de nouveau demandé à ses alliés des fournitures d’armement samedi après-midi, après des frappes sur Odessa.

Ces missiles Taurus, évoqués par les quatre généraux de la Luftwaffe, représentent un vrai point de contentieux de Berlin avec Kiev et les autres capitales européennes. D’autant plus que ces missiles Taurus changeraient la donne dans l’implication des alliés aux côtés de l’Ukraine : leur portée est de 500 km, ce qui mettrait Moscou à portée de l’Ukraine.

Mais en publiant ces écoutes supposées, le Kremlin met des bâtons dans les roues de la coalition fédérale allemande pour d’éventuelles livraisons de Taurus, rapporte le correspondant de RFI à Bruxelles, Pierre Benazet.

En revanche, beaucoup d’alliés livrent déjà des systèmes antiaériens, dont l’Allemagne avec ses missiles Iris-T, mais ils n’ont que 40km de portée. Et la question des Taurus ne va pas changer le calendrier des livraisons, car il y a déjà des flux ouverts vers l’Ukraine pour les Scalp franco-britanniques, pour les batteries de missiles norvégiens Nasams ou pour les missiles antiaériens Patriot fabriqués aux États-Unis.

Au total, 1 000 d’entre eux ont été achetés en janvier par une coalition de huit pays de l’Otan dont les Pays-Bas, l’Espagne et la Roumanie mais aussi l’Allemagne. Une preuve, selon les alliés, que leur engagement envers Kiev restera constant.

« Une tempête dans un verre d’eau »

Le chancelier allemand Olaf Scholz a promis une enquête « très approfondie », deux jours après la diffusion par Moscou. Mais pour Guillaume Ancel, cette affaire « est une tempête dans un verre d’eau ». Ancien officier français et écrivain, il assure que ces révélations ne vont pas compromettent les relations entre les pays alliés, ni altérer leur confiance envers l’Allemagne.

Selon Guillaume Ancel, le réel problème dans cette affaire n’est pas la teneur des discussions, mais les failles de sécurité de l’armée allemande

Pour cet ancien officier et auteur de Saint-Cyr, à l’école de la grande Muette chez Flammarion, l’enregistrement ne contient aucune révélation compromettante, mais qu’il traduit les intentions de la Russie, qui a révélé ces écoutes.

Selon Guillaume Ancel, ces fuites démontrent que «la Russie de Poutine est assez inquiète pour la mobilisation de l’Europe par rapport à la guerre en Ukraine»

Une conversation interceptée lors d’une visioconférence ? 

Pour l’instant, on ne sait pas encore comment la Russie a pu intercepter cette conversation entre militaires, mais quelques informations commencent à filtrer et elles sont plutôt embarrassantes pour les autorités de Berlin. Selon certaines sources, un participant russe a pu se connecter à la visioconférence et visiblement personne ne s’en est rendu compte, a expliqué Roderich Kiesewetter, député conservateur de l’opposition à la première chaine de télévision Ard.

Cet ancien général ne comprend pas comment un échange sur un sujet aussi sensible a pu se faire via Webex, une application grand public. Mais l’opposition n’est pas la seule à monter au créneau. Pour le député des Verts, Konstantin von Notz, membre de la coalition au pouvoir, cette affaire d’espionnage illustre la volonté de Moscou de déstabiliser les alliés de Kiev.

Selon ce député, la Russie essaie de diviser et d’instiller le doute dans la population allemande. Un avis partagé par Marie-Agnes Strack-Zimmermann. Pour cette députée libérale l’intention de Moscou est tout à fait claire : la Russie cherche à intimider le chancelier Olaf Scholz pour qu’il maintienne sa position de ne pas livrer des missiles Taurus.