Coup de théâtre en Colombie : après avoir appelé à la démission de son gouvernement de coalition, le président Gustavo Petro a remercié sept ministres. La crise politique colombienne dure déjà depuis neuf mois, depuis précisément l’arrivée du nouveau président Gustavo Petro, premier président de gauche du pays, confronté à difficultés pour faire approuver ses projets de loi par le Congrès.
Le coup de balai est de taille. Les ministres centristes sont évincés, à commencer par le ministre de l’Économie Rosa Antonio Campo, qui avait fait voter par le Congrès une ambitieuse réforme fiscale, la seule grande réforme votée jusqu’à maintenant.
Le ministre de l’Intérieur et le ministre de l’Agriculture, le domaine clé pour Gustavo Petro, s’en vont aussi, ainsi que la ministre de la Santé Carolina Corcho. C’est une vraie surprise parce que c’est le projet de réforme de la santé qui fait capoter la coalition gouvernementale.
Il faut rappeler qu’en début de mandat, Gustavo Petro avait joué l’ouverture au centre pour constituer une majorité parlementaire. Une majorité hétéroclite puisqu’elle allait du parti conservateur à la gauche radicale. Les partis centristes se sont ouvertement opposés à la réforme de la santé et là, ils sont punis. Maria Jose Pizarro, sénatrice de gauche, explique : « Depuis des semaines, le changement pour lequel les gens ont voté était compromis par le comportement, le chantage des leaders de partis traditionnels. Le pays doit le savoir. Notre pacte fondamental est avec les gens, pas avec les élites politiques accrochées à leurs privilèges. »
En annonçant le nom de ces nouveaux ministres, Petro dit aujourd’hui qu’il reste ouvert au dialogue, mais qu’il a été élu pour faire des réformes sociales. En clair, il y a virage à gauche : « C’est un gouvernement resserré autour du président et de son projet, plus cohérent, analyse le chercheur Yann Basset. Mais également avec des appuis politiques plus limités que la version précédente. » La question maintenant est de savoir comment Petro va gouverner sans majorité au Congrès.
Un « gouvernement d’urgence » doit être installé en Colombie
Lors d’un événement public, Gustavo Petro a estimé qu’un « gouvernement d’urgence » devait être installé en Colombie « puisque le Congrès n’a pas été en mesure d’approuver des articles simples et très pacifiques » sur la répartition équitable de terres. Il veut du changement « pour que jour et nuit, les équipes travaillent à faire baisser le prix des aliments, à donner des terrains aux paysans, augmenter la production agricole, tout en maintenant des prix bas, parce que c’est une donnée fondamentale pour la paix ».
Le premier exécutif formé par le président reposait sur le centre, la droite, et le monde universitaire, et non pas sur les forces de gauche qui l’ont porté au pouvoir. Depuis son arrivée à la tête du pays, Gustavo Petro a dû faire face à plusieurs démissions et, fin février, il a limogé trois de ses ministres.
« Aujourd’hui se construit un nouveau cabinet qui aidera à consolider le programme du gouvernement », indique un communiqué officiel du chef de l’État.