L’Administration publique béninoise souffre ; elle manque de beaucoup de choses : personnel employé insuffisant, vétusté du matériel par endroits, manque de fournitures et équipements de bureau, etc. Les moyens de locomotion n’ont font nullement exception. Les véhicules à quatre roues (car l’usage de motos est le signe patent de la pauvreté) utilisés dans ces services publics s’amenuisent et sont vieillissants. Et le palliatif trouvé pour permettre la mobilité des agents en missions diverses est la location auprès de privés qui en ont, de voitures. Quoi de plus normal car il faut quand même donner les moyens à ceux qui en ont besoin dans le cadre du service.
Depuis que cette option est expérimentée, elle couvre même des besoins exprimés à l’intérieur du pays.
Mais lorsqu’on cherche à savoir comment cette transaction se passe, on tombe des nues. Savez-vous qu’un véhicule loué au privé coûte à l’Etat environ quatre-vingt mille francs (80.000) FCFA le jour ? Ces moyens loués sont parqués au garage central, et ceux qui en manifestent le besoin peuvent s’en procurer à loisir. Du coup, ce n’est plus seulement les privés qui approvisionnent ce marché.
Même des agents publics qui en ont les moyens glissent sur la pente, négocient pour leur compte. Ce qui est ahurissant, c’est lorsque des cadres louent leurs véhicules à l’Etat, à leur propre usage. Cela se remarque surtout quand ils sont en mission ; ils mettent ces moyens à la disposition de la délégation pour une mission ponctuelle et récoltent allègrement le fruit du marché.
Cette pratique qui s’amplifie est savamment entretenue par ceux qui y ont intérêt ; ils luttent contre toute éventualité d’acquisition de véhicules par l’Etat. Car elle enrichit. Prenons l’hypothèse où le véhicule est loué au prix sus-indiqué et ce pendant un mois. Faisons le calcul…
L’option, plutôt que de renforcer à temps partiel le parc automobile, appauvrit l’Etat ; elle est simplement budgétivore. Elle oblige à recourir aux solutions éphémères et fugaces, non durables.
Pire, les automobiles qui ont franchi l’âge de cinq ans, sont rageusement discutés par des responsables qui opposent la nécessité de réforme du patrimoine. Ils précipitent la mort de ces moyens, la proclament même, et s’alignent encore pour le rachat. Ils sont les premiers preneurs dès que le processus de réforme est engagé. Il en est de même des biens meubles que certains, sentant leur retraite s’approcher, déclarent tout le mobilier de leur bureau en état de réforme, et le rachètent au détriment de l’Etat et de l’usage qui devrait en être fait.
L’option de location de véhicules au profit de l’Etat, qui se développe avec la nouvelle classe de cadres en fonctions, annule toutes initiatives d’acquisition de bien mobiliers pour le compte de la personne publique. Et si on n’y prend garde, provoquera, à terme, la dépendance entière de l’Etat en la matière. Et lorsque tout passera dans le patrimoine privé, ce sera la ruine certaine de l’entité. Ce qui se développe sous nos yeux et qui ne vise nullement la pérennisation du service public, est une mort programmée par les agents eux-mêmes.
Il vaut mieux et ce, courageusement, décider d’en finir un jour en autorisant pour une fois encore, l’acquisition de biens mobiliers au profit de l’Etat, et arrêter sans délai cette vilaine pratique qui consiste à envoyer tout à la réformation. Car bien de choses qui peuvent encore servir sont brutalement et prématurément envoyées dans la rubrique des obsèques artificielles. L’option de location de biens meubles privés est à revoir, sérieusement !