Le 2 mars, à l’ONU, une majorité de 141 pays sur 193 a voté une résolution exigeant le retrait des forces russes d’Ukraine. Seize pays africains se sont abstenus, et d’autres n’ont pas pris part au vote, comme le Maroc. La position de Rabat interpelle en Europe dont il est le plus grand partenaire au Maghreb, tout comme aux États-Unis qui avait reconnu la souveraineté du Royaume chérifien sur le Sahara occidental. Semblant craindre des répercussions, le Maroc multiplie depuis les déclarations pour expliquer son geste.
Le Maroc reste fidèle au principe du respect de « l’intégrité territoriale des pays membres des Nations unies », et au principe de la « neutralité positive », indique le ministère des Affaires étrangères dans un bref communiqué. Il dénonce l’usage de la force pour résoudre les conflits et mentionne sa participation aux aides humanitaires pour le peuple ukrainien.
Dans les médias, plusieurs éditorialistes et experts marocains développent l’idée qu’un « vote ou pas du Maroc n’allait pas changer grand-chose » et qu’au regard de l’alliance classique entre la Russie et l’Algérie, Rabat n’allait pas faire ce « cadeau à Alger » en offensant Moscou, fournisseur essentielle du Royaume en matières premières.
Autre argument donné : le Maroc serait fatigué de ses partenaires européens qui ne soutiennent pas assez Rabat sur la question du Sahara face aux indépendantistes du Polisario.
Or la Russie, dotée du droit de veto à l’Assemblé générale de l’ONU, s’abstient depuis des années de voter les résolutions sur le Sahara occidental. Ce qu’apprécie Rabat qui tente, selon des observateurs, de lui renvoyer l’ascenseur. Surtout qu’un nouveau vote doit avoir lieu à l’ONU en avril prochain.
À cela s’ajoute les tensions de ces deux dernières années avec l’Espagne et l’Allemagne. Et le coup de froid avec la France depuis l’affaire Pegasus.
Funambulisme diplomatique
Le Maroc cherche depuis des années à varier ses partenaires stratégiques et économiques. Des accords le lient désormais à l’Inde, la Chine et la Russie, que le roi Mohammed VI a visités.
Le Maroc essaie donc de bâtir un équilibre entre ses principes et ses intérêts, et de ménager la chèvre et le chou. Mais face à la guerre en Ukraine qui semble s’installer dans le temps, face aux pressions croissantes des États-Unis et de l’UE, il parait difficile à Rabat de tenir l’équilibre.
C’est dans ce contexte que Wendy Sherman, la sous-secrétaire d’État américaine, entame une tournée dans plusieurs pays, parmi lesquels le Maroc et l’Algérie, pour discuter de l’Ukraine. Sa tournée comprend également la Turquie et l’Égypte. Elle espère obtenir le ralliement de ces pays à la position occidentale.
RFI