Des pêcheurs nigeriens, installés près des frontières du Bénin et du Burkina Faso, ont-ils été forcés à regagner leur pays, après une attaque jihadiste contre une position militaire béninoise à Porga début décembre ? C’est ce qu’affirment les autorités nigériennes. Mais du côté béninois, on estime qu’il n’est pas exact de parler de départs forcés ou de déguerpissement. Ces familles auraient fui elles-mêmes le village de Kualou.
Plusieurs centaines de pêcheurs nigériens, avec femmes et enfants, ont regagné leurs villages d’origine dans les communes rurales de Gatwani et Tounouga, dans la préfecture de Gaya, frontalière du Bénin, rapporte Moussa Kaka, notre correspondant à Niamey. Selon les autorités nigériennes, qui confirment l’information, ces pêcheurs, installés dans la partie béninoise pour certains depuis plus de trente ans, ont été priés de regagner leur pays d’origine.
Ce retour forcé présumé est la conséquence de l’attaque terroriste contre une position de l’armée béninoise à Porga, le 2 décembre dernier. Selon plusieurs sources, les forces béninoises sont en opération dans cette zone frontalière entre le Bénin et le Burkina Faso, et toute présence de populations civiles dans cette zone de conflits, où les jihadistes pourraient se cacher dans les hameaux, n’est pas souhaitable.
Selon les premiers arrivés dans leur village de Gatwani au Niger, plus de 500 personnes ont fui le village de Kualou, à la frontière entre le Bénin et le Burkina Faso. « Le Niger a pris toutes les dispositions pour accueillir ses ressortissants », a déclaré le gouverneur de la région de Dosso. Une aide alimentaire conséquente a été distribuée aux 81 ménages refoulés du Bénin et revenus sans bagages. Plusieurs ont déploré qu’ils ont abandonné leurs champs de riz et de manioc, sans récoltes. Cette question devrait être gérée par voie diplomatique.
« Nous n’avons chassé personne »
Cependant, le Bénin donne une autre version de l’histoire, souligne Jean-Luc Aplogan, correspondant de RFI à Cotonou. « Nous n’avons chassé personne », explique un des rares officiels béninois qui acceptent d’évoquer le sujet. Pas de réaction ni de communiqué pour l’instant. Le gouvernement béninois est en vacances, souligne un ministre.
À 6 km de Kualou, localité que les pêcheurs ont fui par centaines, le chef du village de Porga, Pierre Yani Wandja, joint au téléphone, raconte avoir constaté les premiers départs quelques heures après l’attaque du 2 décembre. Il pense que les pêcheurs nigériens sont partis par « peur des terroristes et des balles perdues ».
L’armée béninoise est déployée en nombre et en opération de contrôle de zone. Selon nos informations, les auteurs de l’attaque du 2 décembre sont arrivés en pirogue. Juste après, l’armée béninoise aurait détruit des pirogues, apprend-on de bonnes sources.
Commentaire d’un observateur : même si les pêcheurs n’ont pas été évacués expressément, les conditions ont été créées pour qu’ils partent. Et une source sécuritaire tient à faire remarquer que les pêcheurs nigériens ne sont pas les seuls à Kualou
Avec RFI