Ghana : Le projet de loi criminalisant la promotion de l’homosexualité de nouveau à l’étude

Afrique

Examiné une première fois le 2 août dernier, le texte est intitulé « défense des valeurs sexuelles et familiales ghanéennes dites appropriées ». La commission parlementaire chargée d’étudier la proposition a repris lundi 29 novembre ses auditions. Une centaine de personnalités ont commencé à donner leur avis, les mêmes qui ont déjà déposé un mémorandum sur ce sujet.

Le 11 novembre, les premières auditions avaient été suspendues le même jour faute de temps. Pas d’empêchement cette fois-ci, mais toujours pas de consensus. Pour les promoteurs du texte, cette proposition est nécessaire pour aider les personnes LGBT à « se convertir » à l’hétérosexualité. Pour ses détracteurs, ce projet n’a pas lieu d’être car la loi ghanéenne criminalise déjà l’homosexualité.

Mais pour l’avocat conservateur Moses Fo-Amoaning, la loi ne va pas assez loin. Pas d’encadrement par exemple du soutien financier à la cause LGBT. Selon lui, des sympathisants auraient profité de cette faille pour financer à la hauteur de 80 000 dollars la création d’un nouveau centre d’accueil.

Le précédent a été fermé en février par les autorités, accusé, justement, de promouvoir l’homosexualité. Ce que dément Alex Kofi Donkor, directeur de l’ONG LGBT+ Rights Ghana.

« Monter les Ghanéens contre nous »

« L’une des raisons qui nous a poussés à créer ce centre c’était le besoin des personnes LGBT de se retrouver, d’apprendre et de grandir ensemble, tout en dénonçant le statu quo qui perpétue toutes formes de discrimination. Mais notre démarche a été instrumentalisée par des groupes anti-LGBT qui n’ont cessé de monter les Ghanéens contre nous, notamment en diffusant de fausses informations sur les raisons pour lesquelles nous avons créé cet espace. »

Pour le directeur de l’ONG LGBT+ Rights Ghana, il n’y a aucun doute : si la proposition de loi est votée en l’état, cela aggravera l’homophobie et les discriminations contre les minorités sexuelles, et pourrait donner un mauvais exemple à d’autres pays de la région.

« Ce qui va sortir du parlement sera quelque chose qui sera profondément démocratique »

Comment défendre les droits des citoyens LGBT sans être accusé de faire la promotion d’une orientation sexuelle ? Cette question sensible revient souvent dans le débat sur l’homosexualité en Afrique. Et le Ghana n’est pas une exception, explique Anne-Sophie Avé, l’ambassadrice de France au Ghana, qui estime que, Paris n’a pas à s’exprimer sur une affaire « interne ».

Nous, on essaye d’aider les associations militantes ghanéennes à se structurer, à parler avec les parlementaires, on les aide à avoir des conseils juridiques, à être plus armé de pouvoir défendre de façon plus stratégique leurs positions ; pour essayer de tordre le cou à cette idée que ce qu’elles souhaiteraient c’est de faire du prosélytisme. Donc il faut sans doute qu’elles adaptent leur discours pour montrer « mais non, ce que nous souhaitons c’est de ne ne pas être discriminé, ce que nous souhaitons c’est ne pas nous voir interdire un accès à un logement, ou accès à un emploi au motif que nous serions de cette communauté. » Il y a eu 140 mémorandums qui ont été déposés, au Ghana, n’importe qui peut déposer un mémorandum. Il y a peu de pays dans lesquels la commission chargée d’étudier la proposition de loi a l’obligation de recevoir officiellement toutes les contributions de tous les lobbies. Ce qui va sortir du Parlement sera quelque chose qui sera profondément démocratique et qui correspondra au sentiment profond de Ghanéens. Aujourd’hui, seuls s’expriment les extrêmes de chaque côté.

RFI