L’heure de vérité approche pour la droite. Près de 140 000 militants du parti Les Républicains (LR) sont appelés à choisir, à partir de ce mercredi 1er décembre et par vote électronique, leur candidat pour la présidentielle 2022. Portraits des cinq candidats en lice.
Après une campagne marathon dans les fédérations LR aux quatre coins de la France, le jeu reste ouvert entre les cinq candidats : Michel Barnier, Xavier Bertrand, Éric Ciotti, Philippe Juvin et Valérie Pécresse. Qui l’emportera ?
Michel Barnier
« Les Français ont besoin d’un président qui rassure, d’un président respectueux », estime Michel Barnier, 70 ans, qui parie sur sa fidélité au parti et sur sa stature internationale pour gagner cette primaire interne à droite. Ancien commissaire européen et négociateur du Brexit, ce « montagnard », comme il aime se présenter, a un CV long comme le bras qui convainc nombre de militants : député à 27 ans, sénateur, président du Conseil général de Savoie, plusieurs fois ministre sous François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, député européen.
Au point d’en faire le favori ? Affirmatif, répondaient beaucoup au début de la campagne. Mais ses années passées à Bruxelles l’ont éloigné des Français, il souffre d’un déficit de notoriété. Son « moratoire » contre l’immigration, attaqué par ses rivaux à droite pour son manque de clarté et critiqué en Europe, est devenu un boulet au fil des semaines. Surtout, il a peiné lors des débats télévisés organisés pour la course à l’investiture Les Républicains. « Trop en retrait », jugeaient plusieurs militants LR croisés dans l’Essonne.
Xavier Bertrand
Il est le mieux placé dans les sondages pour la présidentielle. Même s’il reste derrière Emmanuel Macron, Marine Le Pen et le désormais candidat officiel Éric Zemmour, les enquêtes d’opinion donnent Xavier Bertrand à 13% d’intentions de vote, contre 10% pour Michel Barnier ou Valérie Pécresse, 6% pour Éric Ciotti et 3% pour Philippe Juvin (selon le dernier sondage Ifop). Alors il l’assure partout face aux militants LR : « Je suis le seul à pouvoir battre Emmanuel Macron. »
Avec son programme en trois axes « Autorité-Travail-République des Territoires », Xavier Bertrand veut s’adresser aux classes populaires et s’appuie pour cela sur son expérience à la tête de la région des Hauts-de-France au nord du pays. Cet ancien assureur de 56 ans a aussi a été maire, député, plusieurs fois ministres sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, ainsi que secrétaire général de l’UMP (l’ancien nom de LR).
Son espoir ? Que bon nombre des nouveaux adhérents apparus à la faveur de cette primaire – 70 000 ont pris ou repris leur carte depuis la rentrée – le soutiennent. Car il le sait : pour s’imposer, il lui faudra avoir reconquis une partie des militants qui lui reprochent d’avoir quitté LR en 2017.
Valérie Pécresse
« Je suis une dame de faire », martèle Valérie Pécresse, 54 ans, en s’appuyant sur son expérience à la tête de l’Île-de-France pour convaincre les militants LR. Face à un Emmanuel Macron qu’elle qualifie de « président clientéliste, président caméléon », cette énarque bosseuse, ancienne conseillère d’État, promet de « remettre de l’ordre dans les comptes et dans la rue » et défend une ligne dure en matière d’immigration et de sécurité. Comme preuve de sa poigne, elle rappelle qu’elle a « tenu bon face aux manifestants » lorsqu’elle était ministre de l’Enseignement supérieur sous Nicolas Sarkozy. Trop francilienne ? C’est sans doute un point faible pour l’ancienne ministre du Budget et députée des Yvelines en région parisienne. Mais les fédérations Île-de-France vont peser dans le vote de départage.
Sur le terrain, les militants saluent ses compétences et sa pugnacité lors des débats télévisés. Ils lui font moins payer le fait d’avoir quitté le parti en 2019 qu’à son rival Xavier Bertrand. Mais Valérie Pécresse pourrait rester coincée entre le chouchou des militants Michel Barnier et le favori des sondages Xavier Bertrand. Alors elle a poussé à fond la machine à nouvelles adhésions et obtenu le soutien de plusieurs sarkozystes comme Brice Hortefeux. Sans compter l’atout femme dont elle joue en citant Margaret Thatcher ou Angela Merkel.
Éric Ciotti
C’est la surprise de cette campagne interne de la droite. À 56 ans, ce député des Alpes-Maritimes (sud-est de la France) et questeur de l’Assemblée nationale est un des tenants de la ligne la plus à droite du parti Les Républicains. Il réclame par exemple un « Guantanamo à la française » et veut mettre fin au droit du sol. « Sécurité, immigration, terrorisme, je porte une ligne très en phase avec les militants », affirmait-il à RFI, à Lisieux, début novembre. Interrogé sur ses différences avec Marine Le Pen ou Éric Zemmour, il refusait que certaines valeurs soient « le monopole de l’extrême droite », et ajoutait : « Nous, à LR, nous avons la capacité à gouverner. »
À la tête de la deuxième fédération LR la plus peuplée après celle de Paris, Éric Ciotti pourrait bien « faire un score », dit-on dans les camps de ses rivaux. D’autant qu’il a été efficace et s’est démarqué lors des débats télévisés face aux trois favoris Michel Barnier, Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, idéologiquement très proches les uns des autres. Le Fillon de 2022 ? « Je n’y crois pas, tacle un cadre LR. Les militants LR sont moins radicaux que ce que disent les journalistes. Il y a beaucoup de nouveaux adhérents et tous ont compris qu’on n’est pas là pour élire un chef de clan. » En tous cas, si la droite choisissait Éric Ciotti, elle laisserait un boulevard à Emmanuel Macron.
Philippe Juvin
Maire d’une ville de banlieue parisienne, Philippe Juvin, 57 ans, était inconnu des Français jusqu’à ce qu’ils le découvrent à la télévision durant la crise sanitaire sous sa casquette de chef des urgences d’un hôpital parisien. Ancien député européen, il n’a jamais été ministre et en fait sa marque de fabrique. « L’avantage avec moi c’est que je ne vous explique pas que je vais faire ce que je n’ai pas fait quand j’étais ministre », ironisait-t-il ce lundi soir 29 novembre face aux militants de Paris.
Percutant en réunion publique ou durant les débats télévisés, le souriant Philippe Juvin a gagné sa place petit à petit dans la course à l’investiture. Aussi ferme que les autres en matière d’immigration ou de sécurité, ce président de la fédération LR des Hauts-de-Seine s’est distingué de ses rivaux en parlant du système de santé et en refusant de supprimer des postes de fonctionnaires. « Il a ouvert les débats », saluait cette semaine un militant LR. Le médecin urgentiste devrait obtenir un score modeste au premier tour mais vu les incertitudes autour du scrutin, son ralliement pourrait en valoir la peine. Il a de toute façon su tirer son épingle du jeu et aura gagné en notoriété.
Avec RFI