« La loi n° 2015-17 portant modification et dérogation aux articles 28, 392, 393 et 465 de la loi n° 2013-06 du 25 novembre 2013 portant code électoral en République du Bénin votée par l’Assemblée nationale le 16 mars 2015 est contraire à la Constitution ». Ainsi en a décidé la Cour constitutionnelle dans sa décision Dcc 15-086 du 14 avril 2015. Lisez plutôt.
Décision Dcc 15-086
La Cour constitutionnelle,
Saisie d’une requête du 27 mars 2015 enregistrée à son secrétariat à la même date sous le numéro 015-C/051/REC, par laquelle Monsieur le Président de la République, sur le fondement des articles 117 et 121 de la Constitution, soumet à la haute juridiction pour contrôle de conformité à la Constitution, la loi n° 2015-17 portant modification et dérogation aux articles 28, 392, 393 et 465 de la loi n° 2013-06 du 25 novembre 2013 portant code électoral en République du Bénin votée par l’Assemblée nationale le 16 mars 2015 ;
VU la Constitution du 11 décembre 1990 ;
VU la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 ;
VU le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle ;
Ensemble les pièces du dossier ;
Ouï Madame Marcelline-C. GBEHA AFOUDA en son rapport ;
Après en avoir délibéré,
ANALYSE DU RECOURS
Considérant qu’aux termes de l’article 92.1 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale : « Le Président de l’Assemblée transmet en quatre exemplaires, au Président de la République, aux fins de promulgation, les lois votées par l’Assemblée nationale dans les quarante-huit heures de leur vote » ;
Considérant qu’en l’espèce, la loi n° 2015-17 portant modification et dérogation aux articles 28, 392, 393 et 465 de la loi n° 2013-06 du 25 novembre 2013 portant code électoral en République du Bénin a été votée le 16 mars 2015 ; que le président de l’Assemblée nationale a transmis le texte de loi au président de la République par la lettre n° 0471-15/AN/SGA/DSL/SCRB du 23 mars 2015 ; qu’entre le 16 mars 2015 et le 23 mars 2015, il s’est écoulé plus de quarante-huit (48) heures ; qu’il en résulte que le président de l’Assemblée nationale a méconnu les dispositions précitées du règlement intérieur de l’Assemblée nationale ;
EXAMEN DE LA LOI
Considérant que par la loi déférée votée le 16 mars 2015, l’Assemblée nationale a procédé à la modification de certaines dispositions de la loi n° 2013-06 du 25 novembre 2013 portant code électoral en République du Bénin ;
Considérant qu’aux termes de l’article 147 de la Constitution : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité de son application par l’autre partie. » ;
Considérant que le protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance, additionnel au protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité de la CEDEAO auquel le Bénin est astreint de par la ratification par le décret n° 2003-264 du 31 juillet 2003 sur loi d’autorisation n° 2003-11 du 09 juillet 2003 prescrit en son article 2.1 : « Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques. » ; que les acteurs politiques s’entendent des partis politiques représentés ou non à l’Assemblée nationale ; que cette disposition du protocole porte sur la question des droits de l’Homme et des libertés publiques affirmée par la Constitution du 11 décembre 1990 dont le préambule rappelle l’attachement du peuple béninois aux principes de la démocratie et des droits de l’Homme ; que le titre II de cette même Constitution consacre trente-cinq (35) articles à la promotion desdits principes et droits ; que la loi sous examen, adoptée le 6 mars 2015, à moins de six (06) mois donc des élections législatives, municipales, communales et locales prévues pour se tenir les 26 avril et 31 mai 2015, l’a été sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques ; qu’elle n’est donc pas respectueuse des prescriptions du protocole A/SP1/12/01 ci-dessus cité auquel le Bénin est astreint ; que, dès lors, il y a lieu pour la Cour de dire et juger qu’elle est contraire à la Constitution ;
D E C I D E:
Article 1er.-. La loi n° 2015-17 portant modification et dérogation aux articles 28, 392, 393 et 465 de la loi n° 2013-06 du 25 novembre 2013 portant code électoral en République du Bénin votée par l’Assemblée nationale le 16 mars 2015 est contraire à la Constitution.
Article 2.- La présente décision sera notifiée à Monsieur le Président de la République, à Monsieur le Président de l’Assemblée nationale et publiée au Journal officiel.
Ont siégé à Cotonou, le quatorze avril deux mille quinze,
Messieurs Théodore HOLO Président
Zimé Yérima KORA-YAROU Vice-Président
Simplice Comlan DATO Membre
Bernard Dossou DEGBOE Membre
Madame Marcelline-C. GBEHA AFOUDA Membre
Monsieur Akibou IBRAHIM G. Membre
Madame Lamatou NASSIROU Membre
Le Rapporteur, Le Président,
Marcelline-C. GBEHA AFOUDA.- Professeur Théodore HOLO.-