Le procureur de la République près le Tribunal de première instance de deuxième classe de Kandi, Karimi Abdoul Adéoti, son substitut, Alphonse Amoussou et le commissaire par intérim du commissariat de police de Kandi, Abrazizou Ali Baba séjournent depuis la matinée de ce mardi 26 mai, à la prison civile d’Akpro-Missérété.
Intelligence avec une organisation de terrorisme, abus de fonction et corruption. Ce sont les trois chefs d’inculpation retenus contre le procureur de la République près le Tribunal de première instance de deuxième classe de Kandi, Karimi Abdoul Adéoti, son substitut, Alphonse Amoussou et le commissaire par intérim du commissariat de police de Kandi, Abrazizou Ali Baba par la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). Ils sont placés sous mandat de dépôt à la prison civile d’Akpro-Missérété. La décision de leur incarcération est tombée ce matin à 4h 48mn après examen du dossier par la chambre des Libertés et de la Détention de la Criet.
Celle-ci a confirmé les réquisitions du parquet spécial de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet). Lesquelles réquisitions ont été également suivies par la commission d’instruction de la Criet qui a statué, avant l’étape fatidique de la chambre des Libertés et de la Détention, sur le dossier et l’opportunité de placement sous mandat de dépôt des prévenus. Les trois mis en cause ont été défendus par une douzaine d’avocats dont Mes Raymond Gbèssèmehlan, Brice Houssou, Fulbert Béhanzin, Casimir Marin Hounto, Amandine Goudé-Djessin, Raphaël Hounvènou, Adiss Salami et Bachar Liamidi, substituant Ibrahim Salami. Tant devant la commission d’instruction que devant la Chambre des Libertés et de la Détention, la défense a soulevé une exception dans le dossier à l’égard surtout des deux magistrats.
En effet, sur le fondement des articles 634, 637 et 638 du Code de procédure pénal, les conseils des prévenus ont estimé que la saisine de la Chambre judiciaire de la Cour suprême est préalable à toutes poursuites d’un magistrat devant une juridiction d’instruction que de jugement. Il revenait à la Cour suprême de désigner la juridiction devant connaître du dossier. En l’espèce, ce préalable n’aurait pas été observé par la Criet. La commission d’instruction encore moins la chambre des Libertés et de la Détention ne peuvent dès lors, à en croire la défense, poser aucun acte d’inculpation à l’égard des deux magistrats. La défense martèle qu’il y a lieu à la Criet d’attendre la décision de la chambre judiciaire de la Cour suprême afin que force reste à la loi.
Non prise en considération la plaidoirie de la défense
« Nous n’avons pas la décision de la Cour suprême. Vous ne pouvez pas bouger. La loi est votre maître », soutient Me Casimir Marin Hounto. Le ministère public représenté par le procureur spécial près la Criet, Gilbert Ulrich Togbonon a pris le contre-pied de la défense. Il a informé la chambre des Libertés et de la Défense d’avoir déjà saisi ce lundi 25 mai la Cour suprême. Cette formalité substantielle a été accomplie et ne saurait constituer un handicap à la poursuite de la procédure.
Gilbert Ulrich Togbonon a rapporté au dossier la preuve de cette saisine. Il va plus loin en évoquant une jurisprudence de la Cour suprême en cette matière relativement à un préfet en exercice dont le cas a été connu par le passé par la Criet et qui bénéficie des mêmes privilèges de procédure tout comme les magistrats prévue à l’article 634 et suivants du Code de procédure pénal. La chambre des Libertés et de la Détention a suivi les réquisitions du ministère public en ordonnant la poursuite de la procédure, en attendant la réponse de la Cour suprême qui devrait intervenir normalement dans huit jours au plus tard. La défense a plaidé ensuite l’inopportunité pour la chambre des Libertés et de la Détention de placer sous mandat de dépôt ses clients qui ont chacun de garantie de représentation. Ils n’ont nulle part à aller pour échapper à la justice, plaident les conseils. La défense demande au trio magistrat indépendant de la chambre des Libertés et de la Détention de ne pas suivre le parquet spécial et la commission d’instruction de la Criet.
Elle plaide à défaut de la mise en liberté des trois prévenus, tout au moins leur placement sous contrôle judiciaire. Mieux, les conseils observent que le dossier est techniquement vide. Il n’y a aucune preuve matérielle encore moins intentionnelle qui montrent que les prévenus ont commis les faits mis à leurs charges. Le parquet de Kandi n’a fait qu’user de son pouvoir de l’opportunité de poursuites que lui confère la loi en libérant le soi-disant terroriste qui serait connu de tous comme un « fou », martèle Me Fulbert Béhanzin. Mais à l’arrivée, la chambre des Libertés et de la Défense n’a pas pris en considération la plaidoirie de la défense. Elle a décidé de placer les deux magistrats parquetiers et le commissaire de Police par intérim de Kandi en détention provisoire.
Les faits
Pour les faits, il est reproché aux trois mis en cause d’avoir remis en liberté un suspect terroriste, le sieur Sadam Oumarou, arrêté le 2 mai dernier aux environs de 11h par les éléments des Eaux, Forêts et Chasses de Kandi en faction dans le parc Pendjari. Le suspect serait de nationalité nigériane. Il a été gardé à vue et écouté par le commissaire de Police par intérim de Kandi. Sadam Oumarou sera ensuite présenté au parquet du Tribunal de première instance de deuxième classe de Kandi. Il a été auditionné par le substitut du procureur de la République qui a sollicité le concours d’un traducteur vu que le prévenu ne parle que le Haoussa et l’Anglais. Mais à l’issue de l’audition, le magistrat du parquet a décidé de relâcher le sieur Sadam Oumarou pour insuffisance de charges. Cette mise en liberté a été jugée suspecte. Comme une trainée de poudre, l’affaire est remontée vers le haut. C’est ainsi que la Criet a été saisie du dossier pour le tirer au clair. Pendant ce temps, le prévenu Sadam Oumarou n’est plus retrouvé depuis sa libération.
Source : La Nation